La plume. — Azores / 03.125

« Mais c’est en continuant de chercher que l’on trouve ! ... Ou pas. »

Azores haussa les épaules à son tour. La seule manière de prouver que l’âme était inexistante, c’était de ne pas la trouver ? Ayant terminé son jus d’orange, elle laissa ses doigts tapoter contre la surface plane de la table. Son attitude était agitée, et le grain verni du bois la distrayait. Un gloussement traversa ses lèvres comme seule réaction à la question de son ami. Elle cherchait, encore et toujours, chaque réponse devait être trouvée très très loin dans l’esprit à la fois lent et beaucoup trop vif de l’artiste. Azores avait fait de nombreuses choses, incalculables ! Très peu dont elle se souvenait, l’Essence l’empêchait de bien compartimenter les moments de sa vie dans sa mémoire. À Gil Dylman, elle pouvait lui partager la chose la plus frappante qui lui était arrivée. Le dire à lui de son plein gré, et à personne d’autre.

« J’ai rencontré quelqu’un. » Azores mit une main dans son visage, toucha sa lèvre puis passa une main dans ses cheveux roux. « Il a promis d’être ma muse mais… j’ignore qui il est. » Froncement de sourcils. « Peut-être le reverrais-je jamais… »

Et l’histoire semblait sans importance, mais qu’elle prenne la peine de la raconter sous-entendait qu’il y ait eu un grand impact sur l’artiste. Sa main descendit sur son cou recouvert d’un haut col, là où se trouvait la marque qui lui avait été faite, celle que Siobhan blâmerait Gil pour.

« Tu ne l’aimerais pas, je pense. Il n’est pas très modéré. » Les doigts sont maintenant sous la table, en train de taper la surface doucement.

Soudain, ses yeux s’agrandirent. Visiblement, elle avait pensé à quelque chose, une hésitation, une remise en question. Elle regarda Gil dans les yeux, comme en quête d’une source fiable à laquelle se raccrocher. Lui, avait les deux pieds dans la réalité, pas elle.

« … Peut-être qu’il n’existe pas, qu’il est uniquement dans ma tête… »

Ses mains s’arrêtèrent enfin et elle posa ses coudes sur la table, calant ses joues dans ses paumes. Elle secoua la tête, revenant elle aussi dans un univers un peu plus vrai.

« Oh, quelle drôle de pensée ! Il existe bel et bien, oublie ce que je viens de dire. »