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 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe



Aaron Dawkins
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MessageSujet: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty02.09.16 23:47 par Aaron DawkinsCiter Editer Supprimer 

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Siobhán Balfe


Une palette de couleur restreinte, mais des couleurs vives. Des couleurs vives, adoucis par les fumées des cigarettes qui se succédaient entre les lèvres, qui se succédaient dans les cendriers. Il en tirait une nouvelle qu'il porta à sa bouche. Le craquement d'une allumette, et elle brûlait, lentement, de la tête au pied, au fil de ses inspirations. Son regard était rivé sur ces tableaux Art Déco baignant dans une obscurité disputée par quelques lumières tamisées. Depuis ce canapé, où personne n'avait encore osé le rejoindre, il observait les toiles. Ses yeux parcouraient les courbes, devenant délicatement, tendrement, par endroit, cubique. Son esprit, perdu dans le whisky et les verres, erraient désormais dans le rouge, le blanc, le vert et la chair de ces hommes, de ces femmes, immortalisés par les peintures et les pinceaux. Immortalisés par l'Art. Un sourire étira ses lèvres. Quelle belle manière de ne pas mourir, mais tout de même, quelle triste manière de survivre. Accroché, ainsi, dans un fumoir, et se limiter à nos contours sans profondeur, à nos bouches sans rire, à nos yeux sans démence, à nos mains sans gorge... Un coup d'oeil aux autres fumeurs, et aux fumeuses. Les costards et les robes habillant ces peaux, ces muscles, et ces os, étaient moins colorés que les tableaux. Et les figurants ne semblaient pas plus vivant. Tout juste bougeaient et parlaient-ils. Ils n'avaient que ça de plus. Le mouvement et la parole.

Le whisky n'avait pas tardé à se mêler à son sang, l'ambre trouvant sa place dans le carmin pour définir une nouvelle couleur à l'image de celle des tableaux. Souvent, il évitait les soirées mondaines. Des deux, Leona était la plus à l'aise au sein de ces soirées. Elle était la sirène, lui le golem. Elle charmait, lui effrayait. Et si elle ne charmait plus, lui effrayait toujours. Par sa démesure, par sa démence, et ses épaules, cette carrure, qui n'avait rien perdu de leurs envergures. Il demeurait le golem, mais la sirène n'adoucissait pas sa présence. Il effrayait, mais on le respectait. Une forme d'obédience par la peur, l'appréhension, le danger que l'on savait qu'il représentait. Imprévisible, despotique, sans merci. Alors il avait dé-serré le nœud de sa cravate, fatigué qu'elle étreigne sa gorge. Débarrassé de cette veste reposant tantôt sur ses épaules, il se donnait un air moins sévère. Une chemise blanche, une cravate mollement pendante, son pantalon noir, sa cigarette, et ses avant-bras posé sur ses cuisses. Penché, les yeux perdus dans les tableaux du mur d'en face, il avait à nouveau cette nonchalance qui lui collait à la peau. Mais personne, toujours, pour venir prendre place à ses côtés, sur ce canapé.

Le fantôme de sa sœur au creux de son oreille, il avait serré des mains, arboré des sourires, discuté sans être véritablement intéressé. Rencontré, échangé, sans se moquer, sans écraser, sans étouffer, sans déranger. Il avait mis le despote au placard au profit de l'homme mondain. Mais fatigué de ce rôle, de cette mascarade, de ce personnage qu'il incarnait sur cette vaste pièce de théâtre, il s'était retiré, dans le fumoir, devant les tableaux, dans la nicotine et l'ambre des whisky. Il hésitait encore, parmi les invités, à chercher l'hôte de la soirée. S'excuser, remercier, se retirer. Il tira à nouveau sur sa cigarette. Redressa la tête vers le plafond pour laisser s'échapper, d'entre ses lèvres, quelques volutes de fumée qui allèrent s'écraser sur le plafond, et retomber sur la toile et les pigments de la peinture. Le fumoir se vidait peu à peu. Comme si quelque chose attirait ses êtres ailleurs. Le brouhaha diminuait. Le calme revenait. Et bientôt, il n'y avait plus que l'art, l'ombre, la nicotine et le tyran dans cette pièce sombre.

L'art, l'ombre, la nicotine, le tyran...
Et Siobhan apparaissant entre les filets de fumée.

« Mademoiselle Balfe, on se languit de moi? »

Contrairement aux commandements de la bienséance, il ne se redressait pas face à cette femme, face aux femmes. Il n'y avait encore que son regard qui se levait, pour capter le sien. Puis des doigts, il fit tourner sa cigarette, en présentant le derrière du tube de nicotine à la femme se tenant face à lui. Derrière elle, les tableaux. Elle remplaçait la figure peinte par la sienne. Un jour le deviendra t-elle, un visage de plus, peint et accroché au mur. Sans profondeur. Sans démence.

Sans sa décadence.


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MessageSujet: Re: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty03.09.16 16:11 par Siobhán BalfeCiter Editer Supprimer 


Les mains afférées dans les derniers préparatifs de sa soirée, petits gâteaux apéritifs sortant du four pour finir par être disposé sur un plateau d’argent. Siobhán tournait et retournait dans sa petite cuisine. Tablier de chef pour protéger sa robe rouge, elle déposait ses gants protecteurs pour se choir sur le plan de travail. Respirant longuement, elle prenait appui sur le rebord boisé, le regard perdu sur les carreaux de ciment qui recouvrait à demi le mur en face d’elle.
Cherchant à comprendre pourquoi elle avait organisé cette soirée, malgré son état d’âme sombre et morose. Lippes remuant sans son, elle se parlait à elle-même, tentant de se donner du courage. Laissant tomber l’incertitude et le doute à travers un sourire forcée, la maîtresse de maison se lava les mains et se débarrassa de son tablier.
Elle prit ce qu’elle avait préparé et quitta la cuisine pour aller dans la salle à manger. Déposant le tout sur la table à manger. Siobhán apercevait certains de ses convives partir en direction du hall d’entrée. Discutant rapidement avec ses retardataires on lui expliquait que l’un d’entre eux c’était proposé pour jouer du piano et les autres avaient envie d’écouter et de danser.
Un simple hochement de tête, avec un sourire. Danser et écouter de la musique, Siobhán aimait ça, elle ne disait même jamais non. Mais faire tout cela, dans son hall d’entrée, sous ce dôme géant de verre, sa peur était toujours trop grande pour faire cela sans qu’une sueur froide lui parcours l’échine et la transperce.
Les laissant partir, Siobhán se dirigea vers le fumoir, y voyant Aaron l’air débraillé et le regard agar sur les peintures qui arboré les murs dans une fumée épaisse et blanche. La scientifique planta sa main sur sa hanche en écoutant sa palabre. Lèvre se retroussant d’un seul côté pour dévoilé un sourire en coin.
« Mes tableaux se languissaient d’être observé avec une telle intensivité. Ne me dite pas que le grand Monsieur Dawkins comptait partir de la soirée, avec l’un d’entre sous le bras ? » S’amusait-elle simplement.
Siobhán lui tourna le dos, pour aller se diriger vers le minibar. Prenant, deux verres en cristal glissé entre ses doigts, la future quarantenaire, les déposa près des bouteilles d’alcool et d’essence dans un cliquetis caractéristique.
Elle jeta un regard par-dessus son épaule. « Vous voulez quelque chose à boire ? Ou bien vous désirez un cigare ? » Lui demandait-elle, une bouteille dans la main prête à ce servir elle-même. Revenant à ce qu’elle faisait, l’hôte se servit un cocktail d’alcool et d’essence.
En s’adossant contre le minibar, elle commençait à siroter son verre en observant l’homme à l’air débrailler. « C’est étrange que vous n’êtes pas avec les autres. A ce qui parait Monsieur Barosso a décidé de nous faire l’honneur de ses talents de pianiste. Je vous aurez imaginer en profiter pour danser avec l’une des convives. » L’informait-elle, en cherchant à comprendre ce qui pouvait l’amener à dégager une telle atmosphère.

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MessageSujet: Re: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty04.09.16 18:45 par Aaron DawkinsCiter Editer Supprimer 

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Le rouge d’une robe sculptant un corps féminin perçait l’opacité des volutes s’échappant de ses lèvres, s’échappant de sa cigarette, et des cendriers au sein desquelles tant d’autres furent écrasées. Ils étaient seuls. Il ne savait pas encore pourquoi. Les autres étaient partis. Moins de brouhaha, moins d’âme vide, moins de banalité navrante, moins de mondanité barbante. Cette femme était plus amusante qu’une centaine de pingouin papotant au fil des cigares. Elle était d’une manière compagnie. Bien meilleure. Avec une main sur ses hanches et un sourire en coin, au milieu de cette obscurité, Siobhan avait quelque chose de spectral. Les fumées des cigarettes lui donnaient une atmosphère propice. Spectral. Et lui, débraillé, nonchalant, sur ce canapé, tendait à cette silhouette fantomatique une cigarette qu’elle n’attrapa pas. Elle snobait la nicotine avec une plaisanterie que les morts ne connaissaient pas. Elle n’avait qu’un air spectral. Elle n’en était pas un. Elle n’était pas morte. Pas encore. Pas pour l’instant. Et lui n’avait pas glissé de tableau sous son bras. Pas encore. Il s’était contenté de se perdre en eux, de se perdre, de fuir en eux. L’art était plus intéressant que beaucoup de ses comparses. Tout juste un peu moins insignifiant, mais tout aussi futile. Alors ses lèvres s’étirent, tandis que ses lèvres relâchent une volute de fumée qu’il avait dérobée à la cigarette venant de retrouver le chemin de ses lèvres. Siobhan lui tourna le dos, il se relevait.

« Je considère avoir assez de vice ainsi pour ne pas m’ajouter celui des voleurs. Puis, quelle ironie cela serait pour le directeur de Magnus que de verser dans le crime, n’est-ce pas ? »

Un rire naquit, désireux de secouer son corps, mais ses entrailles le retint, et il ne s’exprima d’aucune manière. Il tira à nouveau sur sa cancerette, et l’écrasa dans le cendrier le plus près de son ossature de golem. Les verres de cristal gagnaient les mains de la scientifique. Une promesse d’ivresse l’appelé, une promesse d’ivresse tracté par la voix de cette femme. Boire ou fumer ? L’éclat incandescent de sa cigarette venait juste de mourir dans le creux noir d’un cendrier. Combien en avait-il fumé, ce soir, avant celle-ci qui se mourrait ? Combien de verre avait-il déjà bus ? Qu’importe, dans son esprit les verres étaient plus lointains que le tabagisme. Il optait pour les verres. Il avait encore du sang à contaminer. Des gallons de sang à contaminer. Autant d’artère. Des organes. Et son esprit. Bien que lui l’était déjà suffisamment au goût de beaucoup d’autres.

« J’opterais davantage pour quelque chose à boire. Mais ne me demandez pas quoi, au vu des tableaux décorant ce fumoir, je ne peux qu’avoir une confiance aveugle en vos goûts. »

Son regard avait cependant décroché des tableaux ornant ces murs, pour en revenir au rouge de cette robe dont la propriétaire s’adossait contre le minibar. Il déboutonnant les manches de sa chemise, les remontant sur ses avant-bras. Il ne restait plus grand-chose de la tenue qu’il avait en pénétrant dans cet appartement. Plus la veste du costume, plus cette cravate serrée autour de son cou. Comme un démon ayant attendu lascivement dans ce fumoir, entre les cigarettes et le whisky, sans aucune véritable raison. Un démon gagné par la paresse. Un démon gagné par la folie. Un démon qui finit par se redresser, par quitte ce canapé, pour marcher vers ce minibar qu’elle occupait. Elle lui apprit que ce bon Barosso s’en était allé démontrer ces talents de pianiste à la foule. Un sourire sur ses lèvres. Ce bon Barosso. Le plus agréable qu’il aurait pu faire face aux talents de pianiste de celui-ci, c’était encore effectivement de danser avec l’une de ces dames que Siobhan avait invité aujourd’hui.

« Peut-être est-ce parce que les convives ne m’intéresse pas tant que l’hôte de ce soir ? »

Un regard plus appuyé, un sourire en coin. Une flatterie qui avait quelque chose de narquois. Une flatterie qui avait quelque chose de la plaisanterie, sans que l’on ne puisse véritablement discerner l’un de l’autre.

« Et vous, mademoiselle? Les cocktails vous intéressez davantage que les plaintes d’un piano dont on martèle le clavier, ou bien fuyez-vous vos propres convives ? »



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MessageSujet: Re: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty05.09.16 3:28 par Siobhán BalfeCiter Editer Supprimer 


« Si cela vous inquiète. Sachez que bon nombre d’entre nous, le comprendrions. Se faire gangrener par la corruption qui passer à longueur journée. Une journée fatigante, l’esprit troublé et voilà que vous passez de l’autre côté de la barrière. Les risques du métier dirions-nous. » Glissait-elle en réponse à sa palabre, sans obligatoirement attendre une réponse.
Préférant mettre le peu qui restait de son esprit à la tâche de servir une boisson alcoolisée ou non à son convive. Mais qui surtout arrive à lui scier à son palais.
Portant son dévolu sur une bouteille non débouché, elle ferait gouter cette nouvelle bouteille tout droit importé de la surface. Un cognac légèrement ambrée, dont le contenant laissé penser à un coquillage. Certes le type de cette boisson était courant, mais elle n’avait jamais entendu parler de la marque. Henri IV Dudognon Heritage Cognac.
Au moment où elle avait ouvert le cognac pour le verser dans le verre de cristal, elle arrivait à percevoir le bruit symbolique que faisaient des chaussures de bonnes factures. Le liquide remplissait le verre, laissant cette vague déferlante se cogner contre les parois avant de redevenir calme.
Rebouchant la large fiole, Siobhán se retournait pour voir la présence de monsieur Dawkins proche d’elle. La scientifique déposait le tout et tendait le verre à son destinataire.
« Tenez. Vous m’en donnerez des nouvelles. » Il deviendrait un gouteur de marque.
Soulevant un sourcil face aux questions d’Aaron, la presque quarantenaire lui donna comme réponse un rire qui sortait du cœur.
« Ni fuite, ni peur. »  Siobhán faisait claqué son verre contre le sien. « Je vous pari cette bouteille, que d’ici moins de dix minutes tous reviendrons illico presto et viendrons nous tenir compagnie avec leur boniment et discutions vide de sens, mais remplit de fioritures. » Lui proposait-elle.
Apres tout, il avait une chance sur deux d’être gagnant et quand bien même il venait à perdre, il ne sortirait pas d’ici moins riche que quand il était venu.
Mais Siobhán avait un as dans sa manche, et elle était sur de gagner à tous les coups. Si bien, qu’elle ne pouvait pas s’empêcher de faire disparaître ce sourire malicieux qui c’était peint sur ses lèvres.
Se décalant sur le côté, la scientifique se dirigea vers le canapé pour y prendre place. S’adossant sur l’accoudoir, les jambes à moitiés croisées, elle faisait glissée ses escarpins de ses pieds, laissant la maille de ses bas de soie recouvrant ses talons visible à tous.
« Cette infernale machine est désaccordée, aussi bon pianiste soit-il, il n’arrivera pas à en tirer une note correct. Mon espoir de gagner, réside en un seul point, espérer que mes convives ne soient pas trop enivrer pour s’en rendre compte. » Dévoilait-elle son plan, après tout un jeu sans victime ne méritait pas de messe basse.
Siobhán faisait tourner son verre. « A moins que votre tenu soit un indice in explicite pour m’indiquer que vous avez accordée mon piano à mon insu. » Lui faisait-elle remarqué en dardant ses pupilles sur sa tenue.

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MessageSujet: Re: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty06.09.16 19:22 par Aaron DawkinsCiter Editer Supprimer 

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Un contenant aux allures de coquillages, et quelques effluves enivrants s’en dégageant. Un parfum que ces narines ne reconnaissaient pas, qu’importe. Il lui faisait confiance, pleinement confiance. Et l’ambre, guidé par des doigts de femme, se déversait dans le cristal. Un flot remplissant un bassin, un déluge remplissant les mers. Des mers devenant calme, une fois la colère passée. Des mers sur lesquelles nous naviguerons. Des mers dans lesquelles nous plongerons. Des mers dans lesquelles nous bâtirons des Atlantide sous verre. Une sphère nouvelle gravitant dans les abysses. Dans les abysses, avec les Hommes la peuplant. Les doigts du golem se resserrèrent sur le cristal du verre que la scientifique lui tendait. Il porta l’ambre à son nez, pour en écumer les parfums. Un cognac. Un cognac de la surface. Les deux verres claquèrent, l’un contre l’autre, comme deux mondes entrant en collision. Et par une première gorgée, il se laissa dans la quête absurde d’assécher une nouvelle civilisation, dont les terres s’écoulaient désormais dans sa gorge. Ils vivraient dans son sang. Ils mourraient dans son foie. Et lui, se délectait de cet absurde anihilisation. Il bloqua une expiration entre ses lèvres pour faire remonter les arômes dans sa bouche, et ses lèvres s’étirèrent en un sourire. Avec raison, il lui avait fait confiance.

« Je prends le pari, cependant, je vous avoue qu’il me gênerait de vous priver de cette bouteille. C’est un excellent cognac que vous avez là, un excellent cognac. Espérons alors que vos convives reviendront ici avant que les dix minutes ne soient écoulées. »

D’une main, il inclina le coquillage pour en lire l’inscription. Derrière lui, la femme prenait possession du canapé. Henry IV Dudognon Heritage Cognac. Durant une seconde, il essaya de le mémoriser, s’escrimant à inscrire l’appellation dans ses souvenirs. L’appellation de cru de cette qualité était toujours une bonne chose à retenir. Il est des alcools que l’on se doit de faire connaître. Soit pour leurs arômes, soit pour l’ivresse qu’ils nous procurent. Soit l’un, soit l’autre. Rarement les deux. Mais son attention fut bientôt reprise par l’hôte de cette soirée. Il abandonna le coquillage de verre pour s’adosser, à son tour, au mini-bar. La place qu’elle occupait plus tôt, cette femme qui lui confiait désormais l’atout qui la ferait victorieuse. Elle n’avait pas laissé agir le hasard. Si il est bien un petit privilège que les dieux, dans leurs cruautés infinis, ont accordé aux êtres humains, c’est celui de pouvoir arranger, à leurs guises, ponctuellement, les aléas du hasard. Mais à son échelle simplement. Pour ce qui est en-dehors de celle-ci, l’Homme, la vie, le monde, demeure le fruit d’un risible et absurde hasard.

Une nouvelle gorgée de cognac traversant son être. Son regard fut, un instant, attiré par les mailles des bas de soie recouvrant les talons de l’hôte. Sans s’en rendre compte, lui aussi faisait tourner son verre. Quelques vagues dans le monde d’ambre. Et une nouvelle petite gorgée de moins. Le niveau des eaux descendait, et son sourire, à lui, s’agrandissait. Le plaisir de tuer un monde ? La remarque de Siobhan sur sa tenue, plutôt.

« Je suis absolument navrée de vous décevoir, mais cette tenue est plus celle d’un homme qui, affublé de cravates qui étranglent et de veste pesantes sur les épaules, ne trouve pas la liberté qu’il chérit, la liberté qu’il lui fait pour vivre, que celle d’un accordeur de piano… »

Dans le hall, autour du piano, les convives s’étaient peut-être déjà rassemblé pour se délecter des doigts du Barosso, et lui s’était certainement assis, face à l’instrument à queue, pour se délecter de son instant de gloire. Quelques secondes plus tard, les fausses notes s’enchaineront comme une partition écrite par un diable ivre, et probablement sourd.

« Je comprends donc que vous êtes de ceux qui se font les instigateurs de leurs propres chances, mademoiselle. Que dois-je alors penser ? »

Son verre toujours entre les mains, il s’asseyait face à Siobhan, dans un fauteuil défiant par sa masse la longueur du canapé. Ses doigts enserraient le haut de son verre qui pendait dans le vide, un verre tenté par le sol comme les pieds d’un pendu dont le corps n’était plus retenu que par une corde puissamment tressé, noué, serré.

« Que nous nous retrouvons ici, seul à seul, c’est le fruit d’un hasard, ou une chance que vous avez-vous-même manigancé ? »

Chaque mots sonnaient comme une nouvelle arrogance, comme une nouvelle provocation, comme un non-respect grimé de vouvoiement et de politesse. Comme une ombre rieuse, qui révulse, mais attire. Comme un nouveau et tentant chaos.

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MessageSujet: Re: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty08.09.16 1:07 par Siobhán BalfeCiter Editer Supprimer 


« La chance c’est tout de même beaucoup dire. Je ne crois pas en la chance, juste en la science. Les actions d’autrui, les variables de notre environnement, ce ne sont que des données mathématiques. Il suffit de les assembler et de compter sur ses capacités. Mais cela vous le savez mieux que quiconque Monsieur le PDG Dawkins. » Parlait-elle lentement les yeux suivant les mouvements qu’il produisait.
Elle inspire lentement et discrètement, son verre fini par se poser face à ses lippes. Mais il n’y aucune réaction face aux palabres d’Aaron. Et ceux pendant de longue seconde, ou on a l’impression que son regard devient vitreux, sans vie. Mort.
Jusqu’à ce que ses muscles zygomatiques se dessinent un frayage sur ce visage stoïque. Un sourire mesquin et taquin se dévoile. Avant d’être noyé dans la liqueur de son verre. Déglutissant la boisson qui stagnée dans sa bouche, Siobhán déposait son verre sur le guéridon qui se trouvait à proximité du canapé.
« Vous dites chance, peut-être pour vous, laver de tout soupçon et ayant même ma bénédiction pour vider le bar, mais si je garde vos mots je dirais malchance. » S’amuse-t-elle de l’arrogance dont il fait part.
Mais pourtant Siobhán ne prend pas mouche, si pour d’autre personnalité, elle aurait pu crier au scandale, ce n’était pas le cas avec cet être de chair. Bien au contraire, cela l’amusait, se montrer mesquine de façon innocente.
Sa tact vient se poser sur l’accoudoir, laissant ses doigts tapoter les nervures du cuir. Ses cils battent à un rythme régulier. Cherchant à tendre l’oreille pour entendre ce qui pouvait se passer dans l’appartement. Mais en vain, le lieu était bien trop grand et trop bien isolé phonétiquement pour entendre ce qui pouvait se passer derrière une porte.
La tension qui se trouvait niché dans son dos se faisait moins sentir, et la scientifique se délassait sur son assise. « Votre choix d’être ici, est une variable que je n’avais pas prise en compte dans mon calcul. Moi qui aurais pensé, que le charismatique PDG de Magnus aurait préféré tenir compagnie aux dames respectueuses de la soirée pour tenter de les amener vers la corruption, au lieu de rester l’âme sombre parmi des œuvres d’art mortes. » Expliquait-elle alors longuement, tout en parlant rapidement.
Pourtant, Siobhán affiche une moue.
« Dire que j’espérais me retrouver seule pour fumer un cigare sans avoir à subir le regard jugeur de ses têtes « bien faites »… C’est raté. » Se faire juger, cela Siobhán s’en fichait bien mal. Mais l’être dans sa propre demeure, il y avait des limites.

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MessageSujet: Re: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty17.09.16 17:20 par Aaron DawkinsCiter Editer Supprimer 

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« Vous ne croyez pas en la chance, mais vous croyez et, à mes yeux, c’est encore une mauvaise habitude que vous avez là, mademoiselle Balfe, une vilaine manie. Pour ma part, je ne crois en rien, c’est nettement plus simple. »

Aaron asséchait, gorgée par gorgée, le monde en son verre de cognac. Lentement, mais sûrement, et sereinement. Il lui semblait que les volutes de fumée se dissipaient, que l’on y voyait plus clair dans le fumoir. Un peu plus clair. Mais il s’en fichait. Le rouge de la robe de Siobhan était simplement moins étranglé de grisâtre, et ses sourires mesquins plus apparents. Dans la fumée, elle portait une coiffe d’innocence, une coiffe qui ne le dupait pas. Monsieur le PDG Dawkins, comme elle l’avait d’elle-même nommée, avait auparavant mesuré la longueur des crocs du monstre résidant en son âme, en son cœur, en ses entrailles, entre ses tripes et ses ovaires. Siobhan était une jeune décadente à la Ramon Casas, son front marquée au fer rouge par la symbolique du gouffre, prise de ce vertige que l’on ne ressent quand lorsque nous éprouvons la tentation du vide, ce même vide qui nous promet la tranquillité de l’âme. Le vertige est un rejeton de notre liberté. La liberté de choisir entre le bord et le fond du gouffre. De céder, ou de résister, à l’appel du vide. L’appel du vide.

Les doigts tapotant les nervures du cuir le ramenèrent à ce fumoir.
Des doigts accompagnés par la mesure régulière que battaient des cils.

Le tyran était une fausse note dans son calcul froid, dans son calcul de scientifique. Une variable inattendue faussant le résultat, une variable qui bousculait les attentes, une variable qui brouillait le rendu final. Une variable dérangeante, et une figure méphistophélique. De ces figures qui tentent les dames pour les attirer vers les noirceurs de ses ténèbres, vers les ténèbres. De ces serpents sifflotant autour de la pomme en attendant que les belles séduites croquent sa chair. De ces émissaires du diable en perpétuelle quête de nouveau Faust avec lesquelles passer un pacte. Un pacte qui, né dans le sang, s’achèvera dans le sang, comme prisonnier d’une boucle. Un démon se nourrissant de l’observation des damnations.

Un large sourire se dessina sur les lèvres du golem.

« Je peux encore rejoindre le reste de vos convives et vous laissez seule si vous le souhaitez, m’agglutiner à votre piano pour vous laisser à votre cigare. Vos désirs sont des ordres. »

Le directeur de Magnus se relève, le verre de cognac à la main, prenant la direction de la porte, comme pour quitter le fumoir. Mais un sourire en coin sur ses lèvres le trahit. Il n’a aucune intention de partir, et il se place là, devant l’une des peintures recouvrant le mur de cette femme à qui le tournait désormais le dos. La main dans une poche, l’autre tenant le verre de cognac, son regard revenait caresser les contours et les couleurs de cette œuvre qu’il contemplait tantôt.

« Vous savez, je ne trouve pas vos œuvres d’art moins vivantes que certains de vos convives. Je ne trouve pas vos œuvres d’art plus mortes que nombreux êtres humains. C’est une réflexion que j’avais un peu plus tôt, alors que je me perdais dans ce tableau, avant que tous ne quittent cette salle, et que vous y arriviez vous. Être immortalisé par l’Art, c’est une belle manière de ne pas mourir, mais une triste manière de survivre à la mort. Ses modèles ne se limitent plus qu’à leurs contours sans profondeurs, à leurs bouches sans sourire, à leurs yeux sans démences. Ils sont lisses, mais combien d’êtres sont aussi lisses qu’eux, bien que vivants ? Ils sont nombreux à n’être que contours sans profondeurs. Tout juste ont-ils le mouvement et la parole de plus que vos œuvres d’arts. Mais ce qu’ils font de ces deux pouvoirs est navrant. Et le mouvement et la parole qu’ils ont deviennent superflus, accessoires sans intérêts ni conséquences. S’ils ne les avaient pas, cela ne changerait pas, et à mes yeux, ils ne sont pas plus vivant que vos œuvres d’art, que ses modèles qui décorent votre fumoir... »

Il tourne le visage vers Siobhan, un demi-sourire aux lèvres. Un instant, il s’était à nouveau perdu dans les peintures et les formes de ces tableaux. Et, perdu, il avait pensé à voix haute. Un golem peut penser. Un golem n’est pas que rocaille croulant sous les soleils, croulant sous les eaux des cieux, sous les eaux sous-terraines. Il est âme aussi. Âme noire et désarçonnant, âme démente et malade. La meilleure des âmes. La meilleure des armes. Noires.

« Excusez cette interlude philosophique, je vous prie. Je ne voudrais pas vous ennuyer. »


Siobhán Balfe
« La marquée »

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MessageSujet: Re: 06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe   06/125 ▲ Decadent Movement ▲ Siobhán Balfe Empty23.09.16 23:40 par Siobhán BalfeCiter Editer Supprimer 


C’était dans un silence religieux que la scientifique écoutait les paroles, les palabres de son interlocuteur, arrivant même à se perdre dans des rêveries inopinées lorsqu’il se lançait dans une longue tirade. Saison germinal pour que les racines des idées puissent grandir et s’épanouir dans une terre après les mois grisés et noyés d’effluves et de boissons grisantes.
Le sourire pointée à la commissure de ses lèvres peintes.
Son visage s’en trouvait déformer par la bonne humeur et l’amusement, qui tombait naïvement sous le joug du dernier sorti de la bouche d’Aaron. Pour finir par évoluer en un éclat de rire, laissant une larme trouver naissance au coin de son œil.
Une situation cocasse.
« Vous êtes un beau menteur monsieur Dawkins. Vous laissez croire que les croyances ne vous atteigne pas, et pourtant la phrase suivante vous laissez entrapercevoir le contraire. » Hoquetait-elle au début, le temps que son rire disparaisse, mais le sourire, lui, restait.
Levant son regard vers le plafond, elle glissait son doigt sous son œil pour faire disparaitre la larme qui s’y nicher avant de reprendre.
« Un beau parleur, cela doit peut-être marcher sur les jeunes filles naïves. Mais si vous ne croyiez en rien, alors vous seriez juste un robot sans pensées, qui mange, baise, chie et dors. Rien de plus, rien de moins. La croyance née des idées et des pensées et elle peut prendre beaucoup de forme. » La scientifique venait à se lever, mais pendant son action, elle laissait ses chaussures choir sur le sol.
Laissant alors sa robe rouge, s’arrêtant à ses mollets donner l’impression qu’elle est encore plus petite que ce qu’elle était. Sans ses plombs qui lui chevillaient le corps fermement contre le sol, elle avait l’impression de flotter ou de danser. Ne sachant pas d’où pouvait provenir cette sensation, des effets de l’alcool et de l’essence, ou bien plus simplement des bas de nylon contre le parquet ciré.
Contournant les obstacles que définissaient les meubles et autres statues dans la pièce, Siobhán s’en allait vers son buffet à l’autre extrémité de la pièce, laissant alors les deux interlocuteurs à une plus grande distance qui n’avait jamais été.
« Restez-ici. Vous serrez alors mon alibis. » Cette phrase se transformait alors comme un ordre doux.
Tirant le heurtoir du tiroir, elle ouvrait un monde plus personnel, et malgré tout si vide, pour tout simplement en sortir un coupe cigare, un briquet bien trop grand pour une cigarette, et une boite en acajou. C’était ainsi qu’elle se prépara un cigare prêt à fumer.
« Ce n’est pas les hommes dont on se souvient, juste la vanité de l’humanité. Mais bon, si je devais me faire immortaliser par l’art, je ne choisirais pas d’être peinte. Mais plutôt, une statue, ou bien peut être par la danse, la musique. Et vous, que choisiriez si vous deviez être immortalisé, que choisiriez-vous ? » Demandait-elle à l’homme en allumant son cigare.
C’est ainsi, qu’elle crapotait la fumée le temps que le gout de paille disparaisse, pour laisser place au festin.


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