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a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125
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« PELAGIA »
MESSAGES : 585 POINTS : 4076 PRÉSENTATION : www.FICHE DE LIENS : www.DATE D'INSCRIPTION : 29/07/2014
| Sujet: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 20.10.15 23:47 par Clio Chatterton | Citer Editer Supprimer |
| En face d’elle, une femme. Enfin, une femme. Une gamine éplorée, surtout. Plantée là par son mec – ce que suppose Clio. En larmes, du mascara plein les joues, de la morve sur les lèvres. Pitoyable et complètement imbibée d’alcool. Elle balance des phrases incohérentes, des menaces sans queue ni tête, des insultes qui meurent sur ses lèvres avant d’éclater en sanglot, ruinant des yeux de chat finement tracés qu’elle a peut-être mis des heures à perfectionner. Pauvre fille. Clio se contente d’essuyer des verres avant de les ranger sur l’étagère derrière elle. Et elle écoute d’une oreille distraite sans comprendre pourquoi ce connard de Lawrence la met dans cet état. Depuis le temps que la pauvre fille bafouille que ce mec est un salopard, il serait temps qu’elle écoute un peu plus ce qu’elle avance. Clio soupire en reposant un verre sur le meuble.
L’Opale du Chat est tranquille ce soir. Quelques groupes sont là, discutant à voix basses. Des éclats de rire s’élèvent de temps à autre mais aucune drague lourde en vue. Clio passera sûrement sa soirée à nettoyer les verres pour mieux les remplir, nettoyer le comptoir pour mieux le salir tout en épongeant les larmes de cette pauvre fille avec la boîte à mouchoirs des « grandes occasions ». Saloperie de routine de merde, comme on dirait. Et cette fille qui n’en finit pas de pleurer sur sa vie misérable. Un homme s’assied au bar. Certainement bien plus grand qu’elle – mais ça, c’est pas compliqué. Cheveux foncés, rabattus en arrière par une dose maximale de cire – quand elle, elle ne passait que quelques minutes à remettre de l’eau dans ses cheveux pour qu’ils bouclent correctement après la courte nuit de sommeil. Il va s’asseoir à l’autre bout du comptoir, loin de cette fille qui chouine sur sa pauvre et misérable vie et il a bien raison de ne pas vouloir s’impliquer. Pour Clio, c’est déjà trop tard. Elle est engluée dans cette marée de morve sans savoir comment en sortir. Elle dépose son essuie sur le bar, abandonnant le verre encore humide devant elle et elle se penche en avant, appuyée sur ses bras écartés.
« Ecoute. Tu veux quoi ? Qu’est-ce qui te motive dans la vie ? Les belles robes ? Un bon travail ? Rencontrer l’homme de tes rêves ? C’est ça ? Eh bah va dormir, bordel ! »
La fille s’arrête de pleurnicher un moment en la regardant, hébétée.
« Bah ouais. Tu te rends compte que là, tout ce que tu parviens à faire, c’est me donner mal au crâne. C’est pas en restant le cul coincé dans ta minirobe, sur ton foutu haut tabouret que l’homme de ta vie, tu vas le trouver. Tu crois encore qu’il va passer le seuil de la porte, capter que tu pleures comme une fuite dans le dogme, qu’il va te tendre un mouchoir en te susurrant que, mademoiselle, t’es magnifique ? Mais bon sang. Réveille-toi. Sors-toi les doigts du cul. »
Et elle la plante là parce qu’elle en a marre de lui servir des cocktails dégueulasses bourrés de sucre qui finiront dans ses fesses plutôt que dans ses seins et qui la feront pleurer davantage. Elle préfère s’approcher du nouvel arrivant qui attend patiemment – espérons-le – d’être servi.
« Alors, dites-moi. Qu’est-ce qu’un beau brun dans votre genre consomme ? »
Et paf. Charmant sourire sur la gueule.
Dernière édition par Clio Chatterton le 24.10.15 18:30, édité 2 fois |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 21.10.15 12:28 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Il ferme la porte en abandonnant Lâcheur à son triste sort. Tant pis, ce chat a l’habitude de passer ses journées seul et il a l’air de très bien s’en porter. D’ailleurs, il ne lui adresse qu’un de ces regards snobs dont il a le secret et le laisse fermer la porte à clef sans bouger de l’accoudoir du sofa. Un vrai chat de salon, le Lâcheur. Gil hausse les épaules. C’est un chat, un chat ça se débrouille tout seul, alors il n’a pas à s’en faire. Il tourne simplement le dos à la porte et traverse le couloir pour descendre les escaliers de l’immeuble. Il n’a pas envie de se coltiner l’ascenseur, les discussions avec ceux qui réussissent invariablement à y rentrer en même temps que lui. L’escalier est là pour parer à toute éventualité, alors il est toujours là, froid et surtout désespérément vide. Gil le prend toujours quand il n’a pas envie de subir ses voisins et leurs jacasseries. Pourtant, ils auraient de quoi jacasser s’ils le voyaient.
Ce soir, il sort. Pas pour aller à une de ces soirées mondaines auxquelles il veut toujours échapper. Il sort juste parce qu’il n’a pas envie de rester enfermé dans son appartement avec Lâcheur qui lui marche dessus pour avoir un coussin de plus sur le canapé. Il a simplement envie de sortir, sans personne à aller voir, personne à supporter. Il sort juste parce qu’il a envie.
Le soir, le cœur de la cité est calme. Quelques riverains vont et viennent, ici et là, sans se préoccuper de ce qu’il se passe autour d’eux. Gil est de ceux-là, il ne se préoccupe pas de ce qu’il se passe autour. Il marche, les mains dans les poches de son manteau, sans avoir une idée précise de sa destination. Il attend de voir. Il ira là où il a envie d’aller. Il verra, en fonction des endroits qui se présentent, lequel sera celui dont il poussera la porte.
N’importe où tant qu’il sait qu’il n’y verra pas son père. C’est pour ça qu’il est parti. Pour esquiver une conversation qui finira en dispute. Pour esquiver une discussion avec son père, la dernière personne qu’il ait envie de voir sur cette terre.
Il finit par pousser une porte au hasard. Celle d’un bar, qu’il ne connaît pas. C’est bien mieux comme ça. Il n’y a pas grand’monde à l’intérieur, au milieu de l’ambiance tamisée. Quelques groupes disparates qui discutent, à voix basse, de choses et d’autres, et cette fille en larmes qui inonde le bar de paroles sans queue ni tête qui meurent avant même qu’elle ait terminé de les prononcer. Gil va s’installer à l’autre bout du bar. Il installe une distance entre lui et les autres clients. Pas envie de commencer une conversation avec des gens qu’il connaît peut-être, pas envie de savoir s’il les connaît justement. Il n’a pas plus envie d’être celui qui tiendra la chandelle à cette fille quand elle sera assez ivre pour vouloir retourner vers la personne qui l’a abandonnée là.
Il laisse le temps passer, la barmaid engueuler cette pauvre fille. Tant pis, elle a raison. Parfois une bonne claque est nécessaire, il en a déjà fait l’expérience. Quand elle vient vers lui, il lui rend son sourire en haussant vaguement les épaules.
« Qu’est-ce que vous me proposez ? »
Pas de préférence particulière, juste envie de profiter d’un verre, tranquillement.
« Vous venez d’où ? » |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 22.10.15 16:03 par Clio Chatterton | Citer Editer Supprimer |
| N’ayant pas reçu un verre sur le sommet du crâne ou des paroles agressives, Clio suppose qu’elle a vaguement saisi ce qui clochait chez la fille. Un manque de confiance en elle, probablement. Besoin d’un coup de fouet ou juste d’ouvrir les yeux sur sa propre réalité. Le tout multiplié par un abus d’alcool. Comme si la vie, c’était un conte de fées. Comme si, dans la vie, les mecs se ramenaient tout fringuant, un sourire de rêve sur les lèvres pour faire vivre aux pauvres filles les plus belles années de leur vie et ce jusqu’à la fin des temps. Si la vie devait se passer ainsi, il faudrait que quelqu’un leur explique les règles de base. Clio avait vite compris que si elle voulait quelque chose, elle devait se bouger le cul au lieu d’attendre bêtement que quelque chose se passe. L’homme lui laisse le champ libre, apparemment. Très bien, il l’aura voulu.
« Il paraît que les hommes qui demandent ce genre de choses et laissent le champ libre aux barmen sont des hommes faciles à vivre. Vous décririez-vous comme étant un homme facile à vivre ? »
Clio abandonne l’essuie qu’elle utilisait pour frotter les verres et se penche pour attraper le shaker fraîchement lavé, attendant patiemment d’être utilisé. Elle remplit le shaker de glaçons avant d’y ajouter les liquides. Trois mesures de Gin. Une mesure de Vodka. Et une demi-mesure d’un alcool à base de vin et de liqueur d’orange. Elle secoue le shaker jusqu’à ce qu’il devienne givré et verse le tout dans un verre approprié.
« Je viens d’ici. Comme vous. En même temps, je ne vois pas trop d’où vous voudriez que je vienne. La formulation exacte aurait dû parler de mon niveau et dans ce cas, je vous aurais répondu que j’habitais au niveau deux. Vous êtes d’où, vous ? »
Elle hausse les épaules en poussant le verre vers son heureux propriétaire.
« Une boisson d’homme. D’homme vrai. Ça me changera des cocktails de filles. C’est nul les cocktails de filles, c’est tellement sucré que quand je me lèche les doigts, j’ai l’impression de prendre sept kilogrammes. Et parfois, c’est vraiment dégueulasse. A se demander comment elles font pour les boire… »
Clio se déplace de quelques pas vers l’évier rempli d’eau mousseuse dans lequel elle plonge le shaker. Elle savonne efficacement avec une éponge, récurant chaque recoin avant de le laisser tremper dans l’eau chaude du rinçage. Ce serait dégueulasse si elle ne frottait pas correctement. Il y a des gens qui consomment là-dedans, quand même. Elle n’aime pas quand c’est sale, elle pense aux autres et aux conséquences. Même si, théoriquement, le matériel est sain. Elle reprend l’essuie qui commence à se sentir délaissé et s’applique à sécher le shaker.
« Qu’est-ce qui vous amène ici ? Heureux concours de circonstances ? A moins que vous aussi, vous n’attendiez quelqu’un ? »
Elle se décale pour se remettre face au client et se penche, dans un esprit de confidences.
« Je vous préviens : si vous vous mettez à pleurer parce qu’elle vous pose un lapin, je vous fous dehors et ce sans passer par le bureau du grand Patron. J’ai eu mon quota pour la soirée. »
Dernière édition par Clio Chatterton le 22.10.15 22:03, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 22.10.15 20:55 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Un sourire lui échappe et il ne peut que secouer la tête. Facile à vivre, lui ? Non, pas vraiment, en tout cas, c’est ce que son cher père ne cesse de lui répéter. Il hausse les épaules, ses doigts pianotent machinalement sur le bois du bar. Ce n’est pas un signe d’impatience, c’est juste une manière d’occuper ses doigts qui ont l’habitude de ranger des livres sur des étagères.
« Non, je ne suis pas vraiment ce qu’on peut appeler quelqu’un de facile à vivre. »
Il n’entend plus pleurer, renifler. La fille a dû partir, aller prendre un peu d’air frais, ce qui ne lui fera sans doute pas de mal. Peut-être qu’elle rentrera chez elle, peut-être pas. Peut-être qu’elle trouvera quelqu’un avec qui rester toute la nuit même si ce n’est pas une bonne idée, peut-être qu’elle passera la nuit dehors parce qu’elle n’arrivera pas à rentrer chez elle. Gil ne s’attarde pas en conjectures. Ça ne l’intéresse pas. Le cas de cette fille ne l’intéresse pas, et il sera sans doute le dernier à se proposer pour aller l’aider. Il n’est pas venu ici pour aider quelqu’un, encore moins une jeune fille larmoyant sur sa vie. Il est venu ici pour penser à autre chose que son père, la bibliothèque, et le travail qui l’attendra le lendemain matin. La barmaid engage la conversation, elle parle nettement plus que lui, ce qui n’est pas plus mal. Les débuts de conversation, ce n’est pas vraiment son truc. Il y est un peu réfractaire, à force de devoir supporter celles du niveau 1.
« Hm, ma question n’était pas aussi évidente que ça, alors, il faudra peut-être que je la reformule. Pour ma part je suis du niveau 1, et je pense que ça se voit. »
Nouveau haussement d’épaules. Bien sûr, que ça doit se voir, qu’il débarque du niveau 1. Enfant aisé d’une famille de riches, futur propriétaire d’un lieu immense contenant quasiment tout le savoir de la cité de Pelagia, il n’y avait aucun besoin d’être un inspecteur qualifié pour savoir qu’il était du premier niveau. La barmaid pose un verre devant lui. Il sourit vaguement et la remercie d’un signe de tête. Machinalement, il fait un peu tourner le verre sur lui-même en s’interrogeant sur sa composition. Il pensera à demander, il laisse d’abord la rousse finir sa diatribe, souriant un peu plus.
« Personnellement, je n’ai jamais goûté, mais de ce que vous m’en dites, je pense que ce n’est pas plus mal. »
Il la laisse faire sa vaisselle, et commence à siroter tranquillement son verre. Le bar est calme, en tout cas ce soir il a l’air calme. Gil se demande comment c’est, autrement. Pour l’instant, l’ambiance actuelle lui plaît bien. Personne pour venir l’embêter, une barmaid qui a de la conversation et qui a l’air d’être aussi apte que lui à casser du sucre sur le dos des autres. Il ne pourra pas nier que c’est ce qu’il recherchait en quittant son appartement, en abandonnant Lâcheur à son triste sort pour le reste de la soirée.
Il laisse la barmaid revenir vers lui, il repose son verre sur le bois vernis et impeccablement propre du bar, il l’écoute attentivement, gravant chacun de ses mots dans sa tête. Et finalement, il se met à rire. L’espace de quelques secondes, son rire résonne dans le calme du bar. Juste l’espace de quelques secondes. Ensuite, il regarde la barmaid avec un grand sourire.
« Ne vous inquiétez pas là-dessus, je viens simplement pour être tranquille l’espace d’une soirée, loin des obligations, de la famille, du boulot, ce genre de choses… Je n’attends personne, potentiellement personne ne m’attend, à part mon chat mais j’ai l’impression qu’il n’en a strictement rien à faire de moi jusqu’à ce que ce soit l’heure de le nourrir, donc… Non, vraiment, personne ne m’attend. »
Il reprend tranquillement une gorgée de son verre avant de le reposer, sans un bruit, sur le bar. Il penche légèrement la tête de côté.
« Je m’appelle Gil. Gil Dylman. Et vous, votre nom, c’est ? » |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 22.10.15 22:05 par Clio Chatterton | Citer Editer Supprimer |
| Il ne se décrit pas comme étant quelqu’un de facile à vivre et c’est sans doute mieux comme ça. Pour lui, pour sa copine – en imaginant qu’il en ait une – et pour tout le monde. Clio ne pourrait jamais s’imaginer avec une personne « facile à vivre ». Une personne qui dirait « C’est comme tu le sens » ou « On va voir le film que tu préfères ». A petites doses, c’est bien. C’est apaisant. A trop grosses doses, c’est épuisant de devoir prendre les décisions pour deux sans avoir eu à discuter auparavant. Donc, c’est un homme avec du caractère qui vit au niveau Un. A vrai dire, ça se voit, oui. Et ça s’entend. La prononciation est différente, le vocabulaire également. Autre chose qu’aux niveaux Deux et Trois. C’est plus châtié, plus recherché. Il y a un véritable effort derrière chaque mot ainsi qu’un sens caché. Trop de prises de tête. Clio préfère parler vite, avec des mots facilement compréhensibles. Gain de temps, économie d’énergie. Un point pour Clio, elle a réussi à le faire rire ce qui lui arrache un sourire.
« Oh, vous allez vous plaire ici, dans ce cas. Aujourd’hui, c’est un soir calme, y a pas grand monde. Des gens qui se retrouvent, des bandes d’amis. Une fille qui pleure mais qui, apparemment, a décidé de s’en aller – j’espère qu’il ne lui arrivera rien de malsain, quand même. »
Elle repousse une mèche rousse derrière son oreille en rangeant son matériel et en repliant son essuie sur le meuble. Elle tend le cou pour regarder la salle et vérifier que tout se passe bien. Sur une table, au milieu d’une bande d’hommes en grande discussion, des verres déjà vides. Elle ira les chercher dès qu’elle aura répondu à sa question.
« Clio, enchantée. Vous permettez une minute ? Le boulot m’appelle. »
Elle quitte son comptoir pour se diriger vers la table en souriant. Elle demande en se penchant, un sourire chaleureux sur les lèvres si elle peut reprendre les verres et s’ils désirent autre chose. Après quelques vannes foireuses auxquelles elle répond par un éclat de rire, elle retourne à sa place, derrière le bar. Ils reprendront la même chose, bébé.
« Vous disiez vouloir échapper au boulot. Vous avez un boulot très prenant ? Dans quoi travaillez-vous ? »
Elle se retourne pour prendre quatre verres propres sur l’étagère derrière elle. La bouteille de Cognac est déjà sur le meuble. Elle en verse un peu dans les verres, juste ce qu’il faut avant de disposer les boissons sur un plateau. Elle ajoutera la consommation quand elle reviendra. Elle note correctement tout ce qu’ils prennent, histoire qu’ils ne la roulent pas à la sortie. Les consommations de chaque table sont recensées dans un cahier et elle ajoute une ligne pour ce dénommé Gil avant de retourner faire la vaisselle des verres sales. Si elle nettoie tout correctement, elle n’aura plus à le faire après.
« Et par obligations et famille, vous entendez quoi ? Loin de votre femme et de votre enfant ? Si c’est le cas, je ne vous blâme pas. Je ne suis pas vraiment habilitée à juger les gens, en fait. Moi, mon job, c’est de vous servir et de vous faire payer, rien de plus. Mais racontez, ça me tiendra compagnie. »
Dernière édition par Clio Chatterton le 23.10.15 14:40, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 22.10.15 22:52 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Elle s’appelle Clio. Il note ça dans un coin de sa tête, associant directement le visage de la rousse au prénom qu’elle vient de lui donner. Clio, c’est joli, ça sonne bien. Il la laisse aller faire son boulot et se contente de siroter tranquillement son verre, gorgée après gorgée. Il ne compte pas bouger d’ici avant un moment, alors il prend son temps, appréciant le contact du verre tiède sur ses doigts, celui, à peine plus lisse, du bois vernis du bar sous la paume de son autre main. Enfin un endroit où son père ne risquait pas de le trouver en réfléchissant un peu. Enfin un endroit où il pouvait abandonner le niveau 1 pour quelques heures et regarder le monde tel qu’il était en dehors de chez lui, de la bibliothèque, et des obligations que son rang d’habitant du niveau 1 faisait peser sur sa nuque à longueur de journée. Enfin un endroit où il n’est plus obligé de faire semblant de ne pas entendre les conversations des autres et où il n’est plus obligé de les subir, de les écouter malgré lui.
Il entend simplement l’éclat de rire de Clio, mais il ne sait pas pourquoi elle rit. Il ne sait rien de la conversation qui a cours pendant qu’il est là, seul, assis à un bout du bar, occupé à siroter son verre le plus tranquillement du monde. Clio revient, et il pose son verre. Ou il pose son verre, et Clio revient. Tout dépend du point de vue, mais Gil n’est pas du genre à s’attarder sur ces détails. Elle lui a posé une question, et pour la énième fois, il hausse les épaules pour formuler la moitié de sa réponse. Il soupire, légèrement.
« Prenant, on peut dire ça. Je travaille à la bibliothèque, toute la journée. Si ce n’était que ça… Le plus gros problème, en tout cas de mon point de vue, c’est que je travaille avec mon père. C’est lui le patron de l’endroit, et entre nous c’est… assez explosif. On n’a jamais vraiment réussi à s’entendre. »
Son père. Le seul sujet sur lequel il peut disserter des heures durant, avec les livres. Le seul sujet qui mérite qu’il se ferme comme une huître ou au contraire se confie à quelqu’un qu’il connaît à peine. Mais, bah, ce n’est pas comme si Clio avait l’air du genre à répéter tout ce qu’elle entend à tout le monde. Et qui s’intéresserait au vieux fou sans doute paranoïaque qui gère la bibliothèque en attendant de mourir et de la léguer à son fils ? Un notaire, probablement, mais pas grand’monde autrement.
« On n’a encore jamais mis le feu à la bibliothèque en se disputant, mais le fait de ne pas savoir faire autre chose que s’engueuler plombe l’ambiance. On reste chacun de notre côté. Je fais ma part du boulot, lui la sienne, on se dit à peine bonjour et au revoir, et c’est sans doute mieux comme ça. »
Nouveau haussement d’épaules, et il reprend une gorgée de son verre, presque vide à présent. Tant pis. Il en prendra un autre. Ou un verre d’autre chose. Il verra le moment venu, de toute façon il a tout son temps, ici. Il pourra très bien rentrer à minuit passé, comme dans une pauvre petite demie heure. Il n’a personne qui l’attend chez lui, à part un chat plus snob qu’une godiche du niveau 1, et des meubles qui ne doivent pas être très perturbés de son départ. Un jour, peut-être qu’il y aura autre chose que cette boule de poils dotée de griffes à attendre qu’il ouvre la porte.
Il rit, encore, à la question de Clio. C’est plus fort que lui, la question le fait rire. Peut-être qu’il devrait la prendre au sérieux, cette question, comme ses parents et la société ont tant l’habitude de le lui rabâcher, mais non. Pour l’instant, cette question, elle est juste risible.
« Oh non, je ne suis pas marié ! Et je n’ai pas non plus d’enfant. Au grand dam de mes parents, et probablement de leurs connaissances et amis que je ne connais pas. Ça fait un moment qu’ils essaient par tous les moyens de me caser, mais jusqu’ici, si c’est juste pour que les snobs du niveau 1 me regardent avec un peu moins d’insistance, ça ne m’intéresse pas, et je n’ai pas envie de me marier pour la figure sociale. »
Chose qu’il avait maintes fois répétée à ses parents, en vain. Ils ne faisaient qu’essayer de plus belle, et essuyaient à chaque fois des refus secs, définitifs.
« Si c’est pour que le mariage soit malheureux et finisse par éclater et devenir un sujet de discussion pour les cinq prochaines années à venir, non merci. Je crois que je préfère encore attendre au risque de ne jamais trouver que me précipiter droit vers un écueil. »
Et avec un énième haussement d’épaules, il se contenta de finir son verre. Le mariage et la famille. Un sujet qu’il aurait préféré éviter en temps normal, mais qui n’était pas pénible avec quelqu’un qui ne le jugeait pas. |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 23.10.15 14:47 par Clio Chatterton | Citer Editer Supprimer |
| En fait, il travaille à la bibliothèque. Un lieu que Clio fréquentait quand elle étudiait encore à l’école. Elle allait faire ses devoirs sur une table reculée, oubliée entre deux rangées de livres poussiéreux sur l’économie de Pelagia et d’autres sujets ennuyeux. Si Clio prenait cette table, c’était justement à cause de ça : les sujets de ces livres étaient tellement barbants qu’elle ne croisait jamais d’autres âmes vivantes. C’était tranquille, elle pouvait étudier sans avoir à entendre le boucan de la rue. Elle n’entendait que quelques murmures, quelques bruissements de pages. Mais jamais les cris des hommes ne montaient jusqu’à elle. Le problème, selon Gil, c’est qu’il bosse avec son père. Voilà bien le genre de situations que Clio ne peut pas comprendre, faute de père. Sans doute traîne-t-il quelque part, sans doute rentre-t-il du boulot. Sans doute a-t-il une femme, un autre enfant. Il a sûrement un nom mais Clio a autre chose à faire que de courir après un fantôme, une âme indistincte qu’elle ne connait pas.
« Waw. Effectivement, c’est tendu comme relation. Je n’aimerais clairement pas me retrouver entre vous deux, ce serait difficile de rester concentrée. Quoiqu’il en soit, le fait que vous restiez chacun de votre côté aide un peu, non ? Ça évite que vous ayez envie de vous arracher continuellement les yeux. Non ? »
Elle attrape un chiffon et entreprend de frotter le bois verni du bar. Quand tout est propre, c’est bien mieux. Ça donne envie aux gens de revenir, sans doute se disent-ils que c’est propre et charmant, qu’il y a une bonne ambiance. Si les clients reviennent, ça fait des pourboires en plus. Pourboires divisés entre les employés bossant durant le service. De l’argent en plus, c’est toujours ça de pris. Elle attrape le verre délaissé par la fille qui pleurait encore il y a quinze minutes de cela et elle le plonge dans l’eau mousseuse, frottant avec son éponge. Il n’est pas marié. Et il n’a pas d’enfants non plus – remarque, l’un va rarement sans l’autre.
« Êtes-vous en train de vous définir comme étant un « célibataire convoité » ? Non parce que, je comprends parfaitement. Quand on vous regarde et qu’on apprend que, de fil en aiguille, vous êtes entièrement disponible… C’est clair que ça donne envie. Puis, on fait des liens et on se dit que, si votre père est le patron de la bibliothèque, ça fait de vous un héritier potentiel. Et là, BAM. C’est vous qu’on voudrait comme gendre. Bon parti, bonne position, bonne figure, bonne constitution physique… Mais imaginez le bébé que ça fera ! C’est sans doute pour ça qu’ils vous regardent. Vous êtes de la viande. »
Elle rince le verre dans le bac d’eau chaude et l’essuie avant de le ranger parmi les siens, sur l’étagère. Elle jette le dessous de verre dans la poubelle.
« Enfin, je dis ça, mais je suis le genre de personnes qui pense que l’amour, ça fonctionne rarement correctement. Le mariage et les enfants, ça ne m’intéresse – façon, je n’aurai jamais les moyens suffisants pour payer la taxe de l’éventuel deuxième et si je pouvais me passer d’avoir le premier, ça m’arrangerait. Je n’ai quand même pas le temps de m’occuper d’un môme. Je dors le jour, je bosse la nuit. J’ai des horaires décalés. »
Elle se penche pour se saisir du verre vide de Gil et le lève un peu plus.
« Un deuxième ? Ou je vous prépare autre chose ? C’est à vous de voir, cette fois. »
Dernière édition par Clio Chatterton le 24.10.15 17:44, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 23.10.15 20:23 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Il soupire un peu. Bien sûr que sa relation avec son père est tendue. Elle est même plus que ça, il y a un épais mur de glace entre les deux hommes, incapables de discuter sans en venir à s’engueuler, incapables de dialoguer sans que ça ne dérape au risque de devenir violent. Les seules fois où ils se parlent, ce n’est même pas normalement, c’est une injonction du père pour le fils, un rappel du travail qu’il a à faire aujourd’hui à la bibliothèque, gérer le retour et ranger les livres qui attendent de retrouver leurs places sur les étagères. Ce n’est plus un dialogue, il n’y a plus de dialogue. Il y a longtemps que Gil ne va plus rendre visite à sa famille, qu’il attend que ce soit sa mère qui appelle pour ne pas avoir à entendre son père à l’autre bout de la ligne quand il décroche, et qu’il fait sa vie de son côté, avec son appartement, son chat, et le salaire qu’il perçoit de son travail à la bibliothèque. Les avantages du niveau 1 n’ont l’air de rien comparés aux inconvénients que Gil ne cesse de trouver, jour après jour.
Il ricane, avec un de ces sourires désabusés qui le connaissent si bien. Clio n’a pas tort du tout, et c’est ça qui le fait presque rire. Il est disponible, bon à marier. C’est ce qu’on ne cesse de lui répéter. Après tout, il a une bonne situation, un travail stable et même assuré en tant que lègue du poste de gérant de la bibliothèque. A la mort de son père, il héritera littéralement de l’endroit et des responsabilités qui vont avec. Gil est quelqu’un avec une très bonne situation, et il ne doute pas un seul instant être convoité ici ou là dans le niveau 1. C’est même ça qui est gênant. Il garde son semblable de sourire.
« Vous n’avez pas idée d’à quel point vous avez raison. Le niveau 1 est sans doute le plus impitoyable de toute la cité. Rien ne pardonne, la moindre erreur vous plonge dans les méandres de la honte pour les dix prochaines années. Personnellement, je pense que mon père me considère comme la honte de la famille : trente ans, toujours pas marié. »
Il hausse les épaules et fait tourner le verre vide sur lui-même, laissant Clio terminer sa vaisselle. Un autre soupir lui échappe. C’est une manie, une vraie, il soupire souvent sans raisons apparentes, un vieux réflexe gardé de ses années de vie au sein de la maison familiale, qu’il n’est pas mécontent d’avoir abandonnée derrière lui après ses études universitaires.
« En tant que personnes potentiellement “à marier”, nous sommes considérés comme des biens échangeables. Quand on entend untel faire les éloges de la fille de la voisine pour essayer d’accaparer quelques regards ou propositions, on a vraiment l’impression de l’entendre parler d’un meuble, ou du dernier objet de tel fabricant, la nouveauté qui surpasse toutes les autres, celle qu’il faut absolument avoir chez soi… »
Il incline vaguement la tête de côté. S’étendre sur ce genre de sujets, ça le connaît. Il méprise le niveau 1 et son système sans pitié censé assurer la bonne marche de la société et de la famille. Il méprise ses habitants qui ont l’air de se complaire dans leur propre misère de tissus hors de prix, de bijoux aux valeurs inexplicables et de politesses gluantes, gênantes, et hypocrites. Même si, au fond, ils sont tous hypocrites dans ce milieu, même lui. Il est obligé d’enfiler un masque affable, aimable, quand il s’agit de se montrer aux yeux du monde.
« Surtout quand ils savent que vous n’êtes pas qu’un potentiel héritier, mais bien un héritier tout court. A partir de ce moment-là, c’est encore pire. Ils font tout pour essayer de vous refourguer quelqu’un, à croire qu’ils sont eux-mêmes désespérés que leur progéniture trouve un jour un partenaire. »
Il laisse Clio reprendre son verre, et réfléchit un peu. Il a du temps à perdre, et il a l’occasion de casser du sucre sur le dos du niveau 1. Il ne sait juste pas quoi prendre. A chaque fois, il a l’impression que son père prendrait la même chose. Et puis, finalement, pourquoi pas.
« Je reprendrai le même, ça me laissera le temps de réfléchir au prochain. » |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 24.10.15 17:51 par Clio Chatterton | Citer Editer Supprimer |
| Il reprend la même boisson, très bien. Elle réitère son rituel. Trois mesures de Gin, une mesure de Vodka et une demi-mesure d’alcool de vin à base de liqueur d’oranges. Glaçons, shaker. Elle secoue, elle verse, elle sert. Elle a rapidement pris de l’assurance avec les cocktails. L’une de ses nombreuses qualités : elle apprend vite et bien. Elle sait être rapide et efficace. Elle dépose le verre sur le sous-verre en carton en souriant. Et retourne laver le shaker. Elle devrait sans doute lui dire de faire gaffe avec l’alcool mais Gil est un adulte et elle, elle n’est pas sa mère. Elle suppose qu’il connaît ses limites et se mettre minable ne fait sûrement pas partie de ses projets pour la soirée – si projets il y a.
Elle s’accoude au bar en fixant Gil. Elle l’écoute parler. Il parle bien, beaucoup. Il méprise plus qu’elle, aussi. Qu’aurait-elle à mépriser chez le niveau Un ? Les petits cons bourrés de fric qui pensent que parce que Papa et Maman remplissent plus que bien leur portefeuille, ils peuvent se permettre des gestes et des remarques déplacées ? Les pouffiasses qui gloussent et la dévisagent, quand elles sortent en bande le vendredi soir avec leurs mecs ? Il y a tellement de personnes qu’elle pourrait mépriser pourtant, elle réserve sa hargne à l’Amour. Alors entendre que Gil est poussé et reluqué par les autres pour qu’il se marie et fonde une famille, elle trouve stupide. Comme si le fait de ne pas être marié était une tare. Elle, elle n’a ni conjoint, ni mari. Et elle vit. Elle vit comme les autres, peut-être même mieux. Elle profite de ses horaires décalés, elle fait son boulot. Elle vit comme elle l’entend. Elle soupire en se redressant, tapant deux-trois fois sur le bar avant de se retourner pour tirer à elle un haut tabouret sur lequel elle se hisse.
« Le niveau Trois n’est pas mal non plus, dans le genre impitoyable. Les gens parlent forts, crient parfois dans les rues, de jour comme de nuit. C’est le principe du « marche ou crève » pour trouver un boulot à la sortie de l’école. Ils sont peu nombreux, les jeunes qui ont accès à l’université. Voire même inexistants. »
Elle croise ses jambes, tire sur sa jupe noire pour retrouver un semblant de décence.
« Pour ça, j’aime bien le niveau Deux. C’est tranquille. Nous sommes… Nous sommes normaux. Ni trop riches, ni trop pauvres. Juste, normaux. On a un job pour la plupart. On a un toit, c’est tranquille. Sans doute me regarde-t-on bizarrement en apprenant que je vis seule et sans mari mais qu’est-ce que vous voulez que j’y fasse ? L’Amour, ça ne sert à rien. »
Elle attrape un verre sur l’étagère derrière elle et se penche en avant pour remplir son verre avec l’eau du robinet. L’eau n’est pas terrible mais elle n’a pas envie d’ouvrir une bouteille. L’eau du robinet, c’est pratique. Elle n’a jamais été malade en buvant de cette eau.
« Sinon, pour changer de sujet. Votre boulot à la bibliothèque consiste en quoi ? Ça fait des années que je n’y ai plus mis les pieds, il faudrait que j’y retourne… Ne serait-ce que pour étudier les choses que je n’ai jamais étudiées. »
On ne dirait pas comme ça mais Clio, elle aime bien étudier.
Dernière édition par Clio Chatterton le 29.10.15 9:44, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 28.10.15 18:57 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Clio lui parle du niveau trois, et il l’écoute sans l’interrompre, en sirotant simplement son deuxième verre de la soirée. Bien sûr, le niveau trois est dangereux, impitoyable, surtout quand on vient des niveaux supérieurs et qu’on ne fait pas attention. Le niveau trois regorge de guet-apens parfois mortels selon les intentions de leurs créateurs. Du point de vue de Gil, le danger est partout, mais pas toujours de la même manière. Le niveau trois est beaucoup plus risqué que les niveaux un et deux, question qualité de vie, sécurité au quotidien. Le travail est dur à trouver, mal payé, ce qui rendait bien souvent les habitants amers, hostiles envers les plus hautes sphères. Mais le niveau un avait son propre danger. Si, dans le niveau trois, les gens préféraient éventuellement couper des gorges, les habitants du niveau un étaient plutôt adeptes du meurtre psychologique. Tous ces snobs qu’il côtoyait quotidiennement avaient plus ou moins les mêmes manières que lui : rabaisser l’ennemi jusqu’à ce qu’il finisse par être tellement écrasé au sol qu’il prendrait la couleur du carrelage.
Le niveau trois était sanguinolent, mais le niveau un était toxique, nocif et ses coutumes étaient coupantes pour quiconque n’y avait pas été préalablement initié. Gil reprend une gorgée de son verre en regardant Clio s’installer. Le niveau deux est sans doute le plus tranquille de toute la cité. Il a ses dangers, bien sûr, mais Gil ne s’est jamais vraiment intéressé au niveau deux. Le trois a ses centres d’intérêts, son côté sombre agit comme un aimant sur la curiosité du fils Dylman qui méprise gaiement le gratin dont il est issu. Le niveau deux semble jusqu’ici inoffensif, un no man’s land bienvenue pour toute personne désireuse de ne plus entendre parler des vies amères des deux autres niveaux. Les gens doivent juste être aussi regardants que ceux du niveau un concernant la vie comme il faut. Gil penche vaguement la tête sur le côté. Clio change de sujet.
Elle passe à son travail à la bibliothèque. L’espace d’un instant, il se demande comment lui expliquer autrement que par un très concis « je suis le futur patron de l’endroit ». Il pose son index et son majeur sur le pied du verre et le fait vaguement tourner sur lui-même.
« Pour l’instant je suis un larbin à la solde de mon père. Je m’occupe de gérer les emprunts, les retours, de remettre les livres à leurs places. Il y a quinze jours j’ai même écopé de la responsabilité des archives qui étaient mises à la disposition du public. Mais globalement, j’ai le travail de n’importe quel bibliothécaire, la seule exception c’est qu’à la mort de mon père, et sans doute pas avant, ça me ferait trop plaisir, mon père le sait et il ne me fera as cet honneur, je vais hériter de l’endroit et ce sera ma responsabilité de le gérer. Factures, travaux, employés… Ce sera tout pour ma pomme. »
Nouveau haussement d’épaules. Gil ne se plaint pas de sa condition, il a même plutôt hâte de reprendre le flambeau paternel à la bibliothèque, travailler encore pour les années à venir dans un environnement qui lui plaît, au milieu de tous ces livres, de ces étagères qu’il connaît désormais par cœur, à force de déambuler au milieu des rayonnages entiers qui couvrent les murs du bâtiment.
« Mais ça me plaît. J’ai toujours aimé les livres, j’ai grandi dans cet univers et mon père a décidé de m’y faire travailler très tôt, donc en gros il ne me reste plus qu’à attendre qu’il daigne me passer le flambeau. Le mieux avec lui c’est d’attendre et de ne pas trop insister, autrement ça revient à réduire légèrement son espérance de vie de quelques secondes à quelques années. » |
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 29.10.15 9:45 par Clio Chatterton | Citer Editer Supprimer |
| En gros – mais alors là, vraiment en gros – il aurait pu dire « Je suis le futur propriétaire de l’endroit ». Et ça aurait eu de la gueule, de la classe. Grosse admiration pour elle qui n’était qu’employée. Qui n’avait jamais été qu’employée. Peut-on devenir « Chef Balayeuse » dans un salon de coiffure ? Quelle idée stupide. Elle passe une main dans ses cheveux en étouffant un bâillement de l’autre main. La fatigue commence à se faire sentir mais malheureusement pour elle, elle devra encore travailler quelques heures avant d’espérer pouvoir regagner son lit.
« D’accord, d’accord. Ça n’a l’air de rien vu comme ça mais ça m’a l’air d’être prenant. Remarquez, si vous aimez les livres, vous devez être servi. Moi aussi, j’aime les livres mais ce n’est pas comme si j’avais le temps de lire et de lire encore tout ce que j’aimerais lire avant de mourir – ce qui, en soi, serait impossible. J’ai des années de retard à rattraper. »
Elle salue un client venant de passer le seuil de la porte et le laisse s’installer au bar. Qu’il mijote quelques instants, le temps de réfléchir à ce qu’il prend. Une fois le temps écoulé, elle se glisse jusqu’à l’autre bout du bar pour s’enquérir de sa consommation et s’affaire à préparer son verre de Scotch. Le verre d’alcool déposé sur un sous-verre, Clio note la consommation dans le carnet. Elle revient vers Gil et se hisse sur son haut tabouret.
« Bien. Maintenant que je sais que vous avez un bon boulot, une bonne situation, que vous n’avez personne dans votre vie – du moins, par les liens sacrés du mariage – et aucun enfant à charge, que vous avez un père envahissant et que vous aimez les livres. Vous allez aborder les détails. Votre boulot, à la rigueur, m’intéresse peu – c’est uniquement une information supplémentaire pour savoir où je peux, dans l’éventualité où vous oublieriez quelque chose en sortant, vous retrouver. »
Elle se retourne vers la caisse pour encaisser les billets que lui tendent le groupe d’amis de tout à l’heure. Elle compte rapidement, vérifie que la somme notée dans son carnet correspond à la somme qu’ils lui donnent, histoire de leur rendre la monnaie s’ils donnent de trop ou de leur demander le supplément manquant s’ils ne donnent pas assez. Elle discute encore avec eux quelques minutes et finit par placer quelques billets dans un bocal en verre. Pour le pourboire. Une nouvelle fois, elle retourne à Gil après avoir trié les billets.
« Nous parlions détails. Dites-moi ce qui vous passe par la tête. Personnellement, je déteste les histoires d’amour trop gluantes de sentimentalisme, de paillettes, de roses et de cadres fleuris. Cette fille, tout à l’heure. C’est clairement ce que je n’aime pas. Mais vous, à vue d’œil, vous n’avez pas l’air d’être ce genre de personne alors dites-moi tout. Et ce n’est pas la peine de se borner au « Je n’ai rien à dire » car, sachez-le, cher monsieur Dylman, il y a toujours quelque chose à dire. »
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| Sujet: Re: a cocktail in his hand ▬ Gil / Février 125 01.11.15 16:49 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Des détails. Clio demande des détails. Il hausse vaguement les sourcils en souriant nerveusement. Quel genre de détails, là est la question. Il peut lui donner des détails sur tout ce qu’elle veut, même sur les vies de gens qu’elle ne connaît pas, et qu’il ne connaît pas franchement non plus. Les éternelles soirées du niveau 1 ont un avantage : c’est l’endroit parfait pour amasser les potins de tous acabits, mais peut-être que ça n’intéresse pas Clio. Il ne doit pas y avoir grand’monde du niveau 1 à venir se perdre dans cet endroit. Pas qu’il soit sinistre, bien au contraire. Mais ce n’est certainement pas du goût des snobinards et de leurs greluches endimanchées qui préfèrent de loin les lumières des plus hautes sphères de la cité. Gil incline la tête de côté, ses doigts pianotent machinalement sur le bois du bar.
« Des détails… Des détails sur quoi, exactement ? Ce n’est pas avec moi que vous risquez d’entendre des histoires d’amoures gluantes. Quoique, si, vous pourrez en avoir quelques-unes, mais elles ne me concerneront pas. Voilà un détail : le niveau 1 est parfait pour récolter tous les potins que vous voulez, sur qui vous voulez. »
Il hausse les épaules en regardant machinalement autour de lui. Il a presque fini son verre, et il songe qu’il serait peut-être temps de rentrer. Retrouver Lâcheur qui a encore dû faire ses griffes n’importe où parce qu’il s’ennuie, ou qui s’est amusé à claquer les portes qui étaient ouvertes, ou tout simplement à se rouler en boule, de poils noirs, sur tous ses vêtements de couleur claire.
« D’ailleurs en parlant de niveau 1, ce n’est pas contre vous mais je vais sans doute y aller sous peu. Juste histoire de rentrer chez moi avant que ce ne soit l’apocalypse totale dans l’appartement à cause de mon chat qui aime autant la compagnie humaine qu’il sait s’occuper quand il n’y a personne. »
C’est-à-dire pas du tout. Gil termine son verre et attrape son portefeuille dans la poche revolver de sa veste. Il demande rapidement à Clio combien il lui doit, et lui laisse un pourboire avant de se lever, de la remercier et de quitter le bar, direction son appartement où la lourde tâche de retirer des poils de chat noirs de toutes ses chemises blanches l’attend sûrement. La routine. |
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