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Bright. — Alba / mars 125
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« PELAGIA »
| Sujet: Bright. — Alba / mars 125 16.10.15 12:26 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Les gens parlent tout autour, et lui les ignore. Ça ne lui ressemble pas d’ignorer les conversations qui se font aux alentours, d’habitude, il écoute attentivement, guette le moindre ragot qui égaiera un minimum sa journée de travail à la bibliothèque, mais ce soir il cherche le silence. Impensable étant donné l’endroit où il se trouve. La salle de bal est bondée, comme à chaque fois que quelque chose doit s’y passer. Pour lui, il n’y avait aucun moyen d’échapper à cette énième « réception » avec le gratin qu’il charrie dès qu’il en a l’occasion. Se sentant plus coincé qu’autre chose, dans ce costume qu’il aimerait ne plus remettre, Gil attend. Il attend que les heures passent et que les gens commencent à s’éparpiller, à sortir de l’immense salle pour rentrer chez eux. Ce sera le sauf-conduit pour s’éclipser à son tour.
Gil soupire. Il est encore tôt. Trop tôt à son goût, les gens n’en ont pas encore fini de discuter, de danser, de rire et de se raconter tout ce qu’ils ont en tête. Il jette rapidement un coup d’œil à l’intégralité de la salle, repère ses parents au loin. Ils se tiennent la main, esquissent quelques pas de danse. Etrangement, sa mère a l’air heureuse, et ce sont bien les seuls moments où elle sourit avec autant de franchise. Un bref rictus passe sur son visage. Son père est égal à lui-même : froid, raide, et s’il n’a pas l’air de s’ennuyer, il n’a pas plus l’air d’apprécier être là. Gil lève machinalement son verre en gardant son vague sourire méprisant.
« Merci, père, de m’avoir traîné ici. »
Il baisse sa main avec un nouveau soupir. Cette soirée n’en finira donc jamais. Il aurait pu faire comme il faisait avant. Rester avec ses parents, dans un coin, les observer sans bouger, en attendant qu’ils se décident à lui présenter une énième personne. Mais pas ce soir. Ce soir, il refuse de les laisser continuer leur petit manège, c’est pour ça qu’il s’est éloigné. Il attendra, patiemment, que les heures passent. Il en est capable. Alors il reste là, et il attend, baladant son regard d’une personne à une autre. Toujours les mêmes choses. Brillantes, étincelantes, de quoi montrer d’où on vient. Il fait presque tache avec la simplicité de son habit, mais il s’en moque éperdument. Il n’est pas uniquement là pour plaire aux autres, même si, d’après les conventions, il devrait.
Gil n’a pas envie. Il prend une gorgée de son verre, la dernière. Il se demande ce qu’il aurait pu faire, à la place de rester planté là comme un tuteur. Faire jouer Týr avec une plume. Le regarder s’énerver sur les coins du tapis avant de partir en crabe, le dos arqué. Finir la paperasse concernant la bibliothèque et le travail qu’il y exerce actuellement. Ou tout simplement ne rien faire, avec un chat qui lui marcherait dessus à la première occasion. Un nouveau soupir lui échappe et il se décide à bouger un peu. A explorer la salle qu’il connaît déjà par cœur. Quitte à être coincé ici pour des heures entières, autant rendre la chose productive. Il pourra toujours daigner entamer la conversation avec quelques personnes qu’il priera pour ne plus jamais revoir.
Son bras bute dans quelque chose. Il se retourne machinalement, s’excusant par réflexe. La personne qu’il vient de bousculer en voulant en éviter une autre, il la connaît. C’est Alba, Alba Fawkes. Encore une personne rencontrée par l’intermédiaire de ses parents. Mais l’une des rares qu’il apprécie tout de même.
« Oh, bonsoir. » |
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« Invité »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 16.10.15 21:15 par Invité | Citer Editer Supprimer |
| Alba se tenait à l’écart, stratégiquement repliée dans un coin, à l’abri du regard des autres. Elle regarde évoluer les couples, les groupes, les âmes solitaires en priant pour que sa mère se souvienne subitement de sa présence dans la salle et vienne lui dire qu’elle avait fait ce qu’elle avait à faire, qu’elle avait parlé avec qui elle voulait parler et que maintenant, elles pouvaient rentrer. Malheureusement pour elle, Eléanore Crowley évoluait selon une toute autre logique et Alba se voyait destinée à poireauter là encore longtemps. Elle attendait donc là, recluse dans son coin comme les enfants qu’on punit à la maternelle quand ils ne sont pas sages. Elle gardait obstinément un fond dans son verre afin que personne ne pense à lui remettre une dose. Elle estimait avoir suffisamment bu comme ça, merci maman.
Elle avait échangé quelques paroles avec plusieurs personnes, quand sa mère la chaperonnait encore mais maintenant qu’Eléanore avait trouvé danseur à son pied, elle s’était retrouvée seule et libre. Libre de ne plus avoir à sourire comme une idiote face aux réflexions mal placés que sa mère lâchait à son insu. Remarques sur le visage d’untel, observations concernant la carrure d’un second et commentaires sur le métier d’un dernier. Elle n’avait pas retenu les noms et les prénoms. Elle estimait ne pas en avoir besoin. Elle se serait crue au centre commercial, quand les vendeuses piaillaient autour d’elle, vantant les mérites de tel ou tel cosmétiques. A tous les coups, elle aurait pu prendre la fuite et s’en aller comme elle était venue. Elle aurait subi les reproches de sa mère au téléphone durant de longues minutes avant que celle-ci ne place une phrase au sens douteux qu’on pourrait traduire par : « Je te pardonne si tu me dis que tu n’es pas rentrée seule chez toi. ». Cette manie de la vouloir fiancée tournait à l’obsession.
Quoiqu’il en soit, Alba était là. Ses pieds souffraient le martyr, sa tête commençait à lui faire mal et par-dessus tout, les conversations qu’elle percevait partout autour d’elle la rendaient nerveuse. Il y avait décidément trop de personnes à son goût. En tendant le cou, elle reconnaissait certains visages mais ne faisait rien pour attirer leur attention. Quitte à avoir l’étiquette de la jeune femme seule, autant l’avoir sans être ridicule en faisant des gestes qui passeront inaperçus. Avec un peu de chance, elle rentrera chez elle seule dans une heure à peine. Elle recule de quelques pas, estimant ne pas être assez cachée. Quelque chose s’enfonce dans son épaule, l’arrêtant aussitôt dans sa fuite en arrière. C’est une personne, un homme par-dessus tout. Si seulement elle avait eu à faire à un lampadaire… L’homme s’excuse, elle se dit qu’elle va probablement sourire comme une idiote en lui disant que ce n’est pas grave. Elle se retourne, prête à sourire poliment quand elle se rend compte qu’elle connait ce visage. Et qu’elle aurait sans doute dû reconnaître cette voix. Elle porte une main à son cœur en soupirant.
« Gil ! Juve merci, enfin un visage connu… J’ai bien cru que j’allais continuer à m’étouffer dans mon ennui une heure de plus… »
Elle repousse une mèche de ses cheveux derrière son oreille avant de poursuivre, un sourire étalé sur les lèvres.
« Comment vas-tu ? »
Dernière édition par Alba Fawkes le 27.10.15 22:40, édité 3 fois |
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« PELAGIA »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 16.10.15 22:02 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Il hausse vaguement les épaules. Alba a l’air nerveuse, peut-être plus qu’elle n’a l’air de s’ennuyer, mais il faut dire que la foule du niveau 1 est intimidante. Avec ses conventions plus acérées que les griffes de n’importe quel prédateur, ses attentes gluantes et ses politesses trop nombreuses, cette foule aurait de quoi impressionner quiconque. Il l’avait lui-même été, pendant un temps, avant de décider qu’il allait se moquer de ce bagage de riche et mener sa vie comme il l’entendait, se contentant du strict minimum pour ne pas trop révolter ces bonnes gens engoncées dans leurs manières. Un vague sourire se dessine sur ses lèvres, l’espace de quelques secondes.
« Si cela peut te rassurer, tu n’es pas la seule à mourir d’ennui dans cet endroit. Je commençais presque à prendre racine. »
Son regard balaie de nouveau la salle, l’espace de quelques secondes, les couples qui dansent, les gens qui discutent. Le merveilleux gratin qui l’a vu grandir et qui l’a préparé à rentrer dans le moule préfabriqué rien que pour lui, et auquel il n’a aucune hâte de coller. Ses doigts pianotent machinalement sur la surface lisse et transparente de son verre vide où ne subsistent plus que quelques gouttes vermillon sur le fond. Après seulement son attention revient vers Alba.
« Je vais bien, merci. Et toi ? »
A cette allure, la conversation va vite tourner court. Il ne voit pas spécialement de quoi parler. Du travail à la bibliothèque ? Rien de bien intéressant au milieu des rayonnages entiers de livres et des regards insistants de son père sur sa nuque. Il se demande ce qu’il se passerait s’il essayait, là, maintenant, au milieu de tout ce beau monde, de lui rendre la pareille et de fixer un regard noir sur l’arrière du crâne aux cheveux blancs de son cher paternel. Mauvaise idée. Il laisse tomber le projet pour l’instant et réservera l’idée à une autre occasion. Un léger soupir lui échappe. Pas le premier de la soirée, encore moins le dernier. C’est devenu un tic, à force, de montrer un brin d’exaspération, même inexistante, dans un milieu qu’il moque dès que l’occasion se présente, un sourire mi-aimable mi-cynique sur les lèvres et le regard interrogateur. Il profite du rebord de la fenêtre juste à côté pour poser son verre, joint ses mains dans son dos et triture le tour de ses manches.
« Je me passerais bien d’être ici… »
Il sourit légèrement, vaguement, un sourire qui n’est pas moqueur, mais qui n’est pas non plus tout à fait innocent, il incline en même temps la tête de côté.
« L’exigence des responsabilités… ! Je t’avoue que je n’ai jamais bien saisi l’intérêt de ce genre de “rencontres”. Elles n’offrent pas grand’chose aux gens, à part montrer ce qu’ils ont de plus que les autres. Rien de bien intéressant. »
Comme à son habitude, il commence à casser du sucre sur le dos des gens du même milieu que lui. C’est la seule chose qui lui semble intéressante dans cet endroit trop étincelant, trop étouffant, trop conventionné pour être honnête. Le seul point positif de ce « statut » du niveau un est sans doute le confort de vie qu’il offre. Autrement, Gil ne voit aucun intérêt à cette vie mondaine. Il retient un énième soupir, les yeux rivés sur le mur opposé.
« Leurs masques hypocrites leur vont bien, tu ne trouves pas ? » |
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« LÉGENDE URBAINE »
MESSAGES : 1034 POINTS : 4127 DATE D'INSCRIPTION : 24/06/2014
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 18.10.15 12:24 par Le Juge | Citer Editer Supprimer |
| L’homme sans visage était ce soir d’humeur joueuse. Il aimait plus que tout virevolter parmi les esprits des riches âmes qui se prélassent dans les soirées mondaines ; et en passant au-dessus de ces quelques têtes, il aperçût dans un coin deux jeunes échangeant des banalités sur un air de douceur naïve. Or, cette douceur emprise de mensonges et de secrets, il prenait plaisir à la voir éclater en vérités douloureuses.
Se rapprochant du jeune couple, il prit possession des trois femmes peu discrètes aux formes exubérantes qui piaillaient non loin. Elles étaient détestables, de ces héritières sans cervelle qui n’ont jamais su ce que c’était que vivre. Mais à la différence de quelques autres personnes, elles vivaient à travers leur passion : le théâtre. Il existe un metteur en scène très prisé à Pelagia qui prenait plaisir à reprendre le principe terrestre des télénovélas, adapté pour des pièces. Les trois grasses discutèrent donc de l’intrigue incroyable du dernier acte qu’elles avaient eu l’occasion de voir, sans se soucier de leur propre volume sonore.
— Oh, comme j’aurais aimé que l’histoire d’amour entre Marco et Bettany continue… Ils étaient si beaux ensemble ! — Pour sûr Camilla, mais cette fin tragique, en larmes et en sang était si émouvante… Et puis après tout, Marco mérite ce qu’il a eu, c’est un gougeât depuis la première scène. — Je te trouve bien dure, Loretta ! Il était polisson, mais jamais il n’aurait dû être défiguré comme il l’a été ! C’était son cousin le fautif, souviens-toi, c’est lui qui a envoyé la poêle à frire sur Donna. Mme Deering n’aurait jamais dû riposter avec cet… cet… Qu’est-ce que c’était ? Une fourche ? — Je crois plutôt que c’était un balai. Mais il avait l’air aiguisé… — Un balai aiguisé… Tu es bien naïve ma pauvre fille. C’était une fourche ! — Oui enfin, peu importe. Ça va laisser des marques. — C’est sûr. Mais je dois dire que j’ai quand même aimé voir le personnage de Marco souffrir tout du long. Dès le début on nous dit qu’il est inhumain. Il a tout de même trompé Bettany avec Regina… Et la nourrice ! Non. Je le maintiens, il méritait toute cette haine de toutes les femmes qui le côtoient. C’est de toute façon le principe de la pièce. — Oui. Mais pauvre cuisine tout de même. Ils ont tout cassé dans sa cuisine, vous avez vu ? Bettany a tout mis sans dessus-dessous puisque c’était là-bas qu’il avait eu son aventure avec Regina ! — Ce n’est qu’une cuisine Camilla. On parle de la cuisine d’un homme en plus, comme s’il y mettait les pieds habituellement… Je pense que c’était le cadet de ses soucis. — Oh oui, par rapport à la fuite d’eau qui commence à se créer dans sa chambre… Quelle horreur. — Oui ! Et puis, il y a aussi le passage au marché où il recroise son ancien patron et qu’il se fait licencier. Non vraiment, pauvre Marco… — Dîtes… Vous pensez qu’ils reconstruisent les décors tous les soirs ? — Ah ça… C’est le secret de la mise en scène !
Les voilà parties dans des digressions et autres fantasmes qui, pour une raison obscure, ne se font plus entendre par personne d’autre qu’elles. Le couple ne les entend plus, il ne les voit plus non plus. Elles ont visiblement disparu, décalées loin dans le reste de la salle trop grande.
Et l’homme sans visage avec elles.
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« Invité »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 18.10.15 23:55 par Invité | Citer Editer Supprimer |
| Elle n’avait jamais vraiment su comment parler à Gil tout comme elle ne savait pas trop de quoi lui parler. Parler du boulot avec quelqu’un pouvait s’avérer être envahissant, voire même barbant et elle n’était pas sûre qu’il apprécierait de l’entendre déblatérer une soirée durant sur les exploits de tel ou tel gamin de sa classe de maternelle. Savoir qu’Ashton avait colorié son dessin de canard sans dépasser était la chose la plus inutile du monde pourtant, quand elle y pensait, elle trouvait ça extraordinaire. Mais elle n’était pas Gil. Elle aurait pu utiliser leurs passions communes mais ces conversations tournent souvent en rond du coup, c’est à contrecœur qu’elle se rabattait sur une discussion plate et sans grande excitation. Comment tu vas, ça va, au revoir. Mince alors.
« Je vais bien. Je me sens juste un peu… Oppressée ? Par toute cette foule, cette agitation et le bruit qui va avec. J’attendais que ma mère me libère de ma fonction de faire-valoir et gentille fille à sa maman mais apparemment, je peux encore attendre. »
Et elle attendra encore longtemps, surtout si sa mère découvre avec qui elle communique. Depuis le temps qu’elle lui dressait la liste des qualités et des avantages que présentait chaque homme célibataire de Pelagia, elle ne serait pas étonnée que sa mère l’abandonne aux griffes d’un parfait inconnu, du moins si sa réputation en vaut la peine. Alba et Eléanore n’avaient décidément pas la même vision du bonheur. Elle en viendrait presque à espérer que Gil soit fiancé pour pouvoir vivre en paix. Gil méprise ouvertement les personnes présentes dans cette salle. Alba se contente habituellement de sourire poliment sans écouter le quart de ce qu’ils lui avancent – à moins que le sujet ne l’intéresse. Elle hausse les épaules en abandonnant son verre sur le plateau d’un serveur.
« Ils font ce qu’ils peuvent, Gil. L’humilité n’est pas donnée à tout le monde. »
Elle passe une main sur le tissu beige de sa robe, effaçant quelques plis invisibles sur son passage. Elle a remis une vieille robe pour l’occasion. Une toilette simple mais efficace, le genre de tenues qui n’attire aucun compliment et donc aucun groupe de cruches bruyantes. La tenue parfaite. A côté d’elle, un groupe de trois femmes qu’elle avait à peine remarqué auparavant. Elles discutent le bout de gras avec leurs voix nasillardes, débattant sur la place de tel ou tel personnage dans une pièce de théâtre dramatique qu’elles auraient vue ensemble. L’incroyable histoire de Bettany et Marco. De Bettany cocufiée par Marco avec Regina dans la cuisine. L’histoire d’une cuisine saccagée. L’histoire de… Intriguée, elle se retourne vers les trois femmes mais étrangement, il n’y a plus personne. Sans doute se sont-elles fondues dans la masse mouvante des corps dansants.
« Les gens sont parfois d’une stupidité exemplaire… »
Alba porte une main vers sa poitrine, le temps de respirer deux secondes. Elle ne peut pas s’empêcher d’accorder une attention particulière à chaque bruit, chaque son et cela la rendrait presque folle. Elle pose sa main sur l’avant-bras de Gil.
« Tu n’aurais pas envie d’aller faire un tour ? Il ne s’agit pas d’aller trop loin, juste… Ce serait juste pour s’éloigner des gens. Du bruit. Je ne me sens vraiment pas à l’aise ici et ma tête commence à me faire souffrir. »
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« PELAGIA »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 19.10.15 17:40 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Un rictus et un rire nerveux lui échappent quand Alba parle d’humilité. Elle n’a pas tort, loin de là, et c’est bien ce qu’il trouve risible à la situation. Il est amusé. D’ordinaire, Alba a tendance à trouver des excuses aux autres, et il s’amuse parfois à la taquiner, se faisant plus cassant dans ses propos pour voir quels prétextes elle trouvera pour excuser la prétendue conduite d’untel ou d’untel. Mais ce soir, elle a plutôt l’air prête à casser du sucre sur le dos des autres. Il ne niera pas que ça lui plaît.
A leur gauche, un groupe de femmes discute. De tout, de rien, d’il ne sait trop quoi. Il écoute, malgré lui, la conversation sur ce qu’il devine être une pièce de théâtre. De ce qu’il entend du scénario, il n’y a rien d’extraordinaire, rien qui mérite le coup d’œil. Il tourne machinalement la tête pour apercevoir ce groupe de drôles occupées à piailler, et son regard s’arrête l’espace d’un instant sur quelque chose. Sur du vide. Sur du rien. Alors qu’il est certain d’avoir aperçu quelque chose. Gil fronce légèrement les sourcils et scrute de plus belle cet espace vide qu’il est convaincu avoir vu occupé l’espace de quelques millisecondes. Il y avait quelqu’un, ou quelque chose. C’est étrange, cette sensation. Celle d’être presque menacé, alors qu’il ne se passe rien. Il secoue la tête, ferme les yeux quelques secondes et respire calmement. Il n’a pas de raison de se sentir menacé.
Cette conversation sur une pièce de théâtre médiocre est une conversation tout ce qu’il y a de plus anodin dans le milieu qui l’a vu naître. On s’embarrasse de détails, on porte une attention particulière aux détails, on crache sur le travail grossier tout en continuant de le regarder. Cette pièce de théâtre n’a pas lieu de retenir son attention. Alors il la reporte sur les gens de la salle, et hoche la tête à ce qu’Alba dit.
« Seulement parfois ? »
Comme d’habitude, sa phrase est accompagnée d’un petit sourire. Pour quelqu’un d’extérieur, ce serait anodin, presque innocent. Mais Alba le connaît, et elle saura très bien déceler la moquerie latente, cachée derrière ces deux petits mots. A nouveau il balaie la salle du regard et à nouveau ses yeux s’arrêtent sur le couple que forment ses parents, toujours occupés à valser, l’air heureux, tranquilles, au milieu des autres et de la musique. Il détourne le regard. Inutile d’attirer leur attention à les fixer jusqu’à ce qu’ils se sentent observer. Autant éviter les discussions embarrassantes et agaçantes sur son avenir, sur celui de la famille. Celui de la famille a le temps, et lui n’a pas envie d’y penser.
Alba pose sa main sur son avant-bras. Il tourne la tête pour la regarder, et la laisse parler sans rien dire, avant de finalement opiner du chef.
« Bonne idée, il y a un accès au balcon par le couloir. »
Posant sa main sur la sienne pour que la foule n’ait pas la bonne idée de les séparer, il prend le chemin de la porte de la salle, salue d’un vague signe de tête les deux majordomes plantés de part et d’autres des battants avant de les ouvrir, les refermant une fois dans le couloir. Il bifurque sur la droite, habitué, s’étant déjà évadé de la salle en pleine soirée pour esquiver les conversations et l’air étouffant de parfums d’une soirée quelques années plus tôt. Il avait fait les cents pas dans le couloir avant de tomber sur cette porte, presque dérobée, donnant accès au balcon.
Il l’ouvre et la tient ouverte pour Alba, la suivant tranquillement, laissant le battant se refermer en claquant légèrement. Sur le balcon, l’air est plus frais, à cette heure-ci l’eau qui les entoure est presque noire, et quelques poissons et méduses viennent parfois frôler la surface vitrée qui forme le cocon de la cité.
Gil soupire vaguement avant de s’asseoir sur le banc, étendant les jambes et croisant les chevilles.
« L’endroit parfait pour être tranquilles et éviter d’avoir à subir mille et une questions sur tout ce qui aurait la bonne idée de leur passer par la tête. » |
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« Invité »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 20.10.15 0:08 par Invité | Citer Editer Supprimer |
| Alba n’était pas d’humeur à pardonner leur stupidité mondaine aux autres. Elle n’était pas d’humeur à dire que si les autres étaient hypocrites, c’était une manière comme une autre de se défendre tout comme elle n’avait nullement envie de dire que s’ils agissaient de la sorte, c’est parce qu’on leur avait appris qu’il fallait agir de la sorte. Se montrer sous son meilleur jour, sourire plus intensément que les autres, porter des parures et des tenues digne des contes. Il fallait toujours se battre, toujours trouver mieux que les autres, étudier mieux que les autres, réussir mieux que les autres et à la longue, elle ne comprenait pas comment les autres n’en étaient pas fatigués. Gil n’est pas comme elle. Il ne se tue pas à chercher des excuses qui ne serviraient à rien. D’un côté, ça lui plaît de se dire qu’il est bien moins naïf qu’elle.
Alba laisse Gil recouvrir sa main de sa paume en le suivant le long d’un couloir désert. Du moins, elle imagine que ce couloir est désert. Elle se laisse guider, le nez en l’air en observant les moulures au plafond. Son père aurait pu passer des heures à lui expliquer comment en arriver à ce résultat, avec quel type d’outils et quel matériau. Alba aurait dû poursuivre la route de son père, continuer à graver et sculpter, même si elle était nettement mois douée. Gil pousse une porte et se décale pour laisser Alba passer en premier. Elle le remercie d’un hochement de tête.
L’air est plus frais à l’extérieur et Alba ferme les yeux pour accueillir la fraîcheur. Ses oreilles bourdonnent de ne plus entendre la musique, les rires et les voix fortement rehaussées par l’alcool coulant à flots. Elle lève les yeux vers le haut dogme de verre où passent poissons et autres animaux marins. Des méduses brillent à la surface. D’un coup, elle se sent mieux. Bien mieux qu’à l’intérieur. Quand elle était petite, ce n’était qu’un simple malaise, une impression d’être minuscule. Depuis l’attentat du temple, elle a l’impression que tout peut lui sauter à la figure à tout moment. Gil dit quelque chose et Alba redescend sur terre. Elle croise les bras dans son dos en se balançant sur ses escarpins.
« Tes parents ? Ou les autres ? Sans doute les deux… Ça ne va pas mieux ? Avec ta famille, je veux dire… Sans vouloir être indiscrète, bien entendu. »
Savoir si elle avait le droit ou non de lui poser ce genre de questions était délicat. D’un côté, elle se disait qu’il risquait de se fermer plus vite qu’une moule mais d’un autre côté, il lui en parlerait s’il en ressentait le besoin. Alba se rapproche de Gil, le tissu de sa robe frottant à chaque pas contre ses jambes. Saloperie de robe. Elle aurait dû être chez elle, dans une tenue bien plus confortable que celle-ci. Dans une vieille robe ou dans un pantalon miteux. Elle devrait être en train de dormir. Elle se penche dans la direction de son compagnon et tend ses mains vers son cou afin de saisir le col de sa chemise.
« Ne bouge pas. Ton col est mal mis et ça me perturbe depuis le début. »
Elle remet correctement le tissu avant de poser ses mains sur les épaules de Gil en souriant.
« Voilà qui est bien mieux. »
Alba finit par s’asseoir à ses côtés, lissant des plis sur sa robe.
Dernière édition par Alba Fawkes le 23.10.15 15:47, édité 1 fois |
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« PELAGIA »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 20.10.15 18:32 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Un haussement d’épaules accompagne un vague soupir, et il regarde ailleurs. Par la grande baie vitrée donnant sur la salle, toujours fermée, d’où personne ne les verra parce que personne ne fera attention à eux. C’est bien simple, ils sont trop occupés avec eux-mêmes, à patauger dans les politesses sans fin, gluantes, à plaisanter avec un rire jaune sur les dernières nouvelles qui traîneraient dans ce niveau 1. Personne ne fera attention à deux âmes éloignées, recluses sur le balcon, en quête d’un air plus léger et d’un peu de tranquillité. Quelques rires percent le verre, de temps en temps, mais jamais très fort. La musique est à peine audible depuis ce balcon. Tout le monde est déjà occupé par les derniers potins, par les arrangements à créer ici et là. Il ne voit pas non plus ses parents, qui doivent être loin de cette fenêtre, ils n’ont même pas dû remarquer son absence. Ce n’est pas comme s’il attendait de son père qu’il remarque quoi que ce soit à son sujet.
« Oh, ça ne s’arrangera jamais avec ma famille. Enfin, avec ma mère, peut-être, mais avec mon père, mieux vaut ne pas rêver inutilement. »
Gil regarde les méduses qui glissent le long des lourdes parois qui les protègent tous de l’océan. Elles ont l’air tellement loin de tout ça, elles. Sa mère. Il ne lui en a jamais vraiment voulu, elle ne fait que suivre les attentes du milieu dans lequel elle a grandi. Il ne peut pas lui en vouloir, elle doit gérer la pression sociale d’une mère de famille. C’est à son père qu’il tient grief. Son père et ses éternels reproches, le dialogue qui n’existe plus et les conflits perpétuels. Gil soupire à nouveau, et laisse les méduses tranquilles. Elles continuent d’évoluer au milieu de l’eau sans se soucier de si quelqu’un les regarde ou pas. Ce sont des méduses. Elles s’en foutent, des humains, les méduses.
Alba s’approche. Il ne le remarque pas tout de suite, elle est dans le coin de son champ visuel. Elle tend les mains en lui parlant de son col de chemise. Un léger sourire, désabusé, passe sur son visage. Le tissu est mal mis. Il aurait dû s’en douter.
« Oh, j’ai encore dû le… »
Il ne finit pas sa phrase, l’accompagne d’un bref geste de la main. Il a encore dû triturer le tissu, le plus machinalement du monde, peu heureux d’être coincé avec le gratin pour de longues heures, cherchant une excuse pour s’éclipser plus tôt que tout le monde. Il sourit un peu, plus franchement, et remercie Alba. Il n’aurait sans doute pas remarqué la mauvaise mise de son col avant de rentrer chez lui. Tant pis. Les gens auraient eu de quoi parler pendant quelques jours, tout au plus. Beaucoup de bruit pour un peu de toile.
Alba s’assied à côté de lui. Il ne dit rien. Pour un peu, il retournerait regarder les méduses, il n’a qu’à lever la tête pour le faire. Il laisse le silence planer, quelques secondes. Quelques secondes où il n’y a plus que les quelques bruits qui réussissent à traverser le verre de la baie vitrée qui les sépare de la salle et de toute son agitation. Finalement, il tourne la tête vers Alba.
« Tu sais, au fond, je n’ai rien contre ma famille. Enfin, à part mon père, mais lui c’est un cas spécial, et j’ai l’impression qu’il n’a pas plus envie que moi que les choses s’arrangent un jour. C’est juste que… »
Il hausse vaguement une épaule.
« Il y a déjà tellement de pressions de partout dans ce milieu, j’ai l’impression que je ne suis voué à vivre que pour ma famille. J’aimerais juste… un peu de temps pour vivre pour autre chose que cette histoire de bibliothèque, de descendance ou de je ne sais quoi d’autre qu’on me répète depuis que je sais parler. » |
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« Invité »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 23.10.15 15:50 par Invité | Citer Editer Supprimer |
| Alba ferme les yeux et laisse un courant d’air rafraichir sa peau. Elle s’oblige à respirer profondément, bien plus à l’aise sur ce balcon que dans la salle de bal. Elle ne sait pas trop ce qu’elle n’aime pas, chez les foules. Les voix fortes, qui essaient de se faire encore plus fortes que les autres voix fortes. Les commentaires hargneux, la déshumanisation des personnes qui ne répondent pas aux normes imposées par la société et qui ne sont sans doute pas de bonnes normes. Elle n’aime pas les parfums qui se mélangent les uns aux autres, comme les fils d’une pelote de laine. Et elle n’aime pas qu’on la regarde, elle. Qu’on l’observe comme un trophée, qu’on estime son âge et son métier, qu’on s’intéresse à ce qu’elle aime ou n’aime pas faire. Elle n’aime pas les questions personnelles que de parfaits inconnus lui adressent.
Elle sait comment ça se passe avec sa famille mais elle ne peut s’empêcher d’espérer une petite amélioration, une toute petite amélioration. Une poussière de « meilleur » s’il ne fallait que ça. Le père de Gil, ce qu’il attend de lui et ce qu’il ne veut pas entendre sont des sujets qui reviennent souvent sur le tapis. Et à chaque fois, la situation a l’air désespérante. Alba repousse une mèche rebelle derrière son oreille. Son chignon doit avoir souffert depuis le temps qu’elle le porte. Elle hésite à le défaire ou à le garder jusqu’à la fin. Elle pose sa main sur celle de Gil et la presse. Elle ne sait pas quoi dire. Elle aurait mieux fait d’aborder un autre sujet. Alba ne connaît pas la pression. Bien sûr, ses parents auraient préféré qu’elle devienne artiste, comme eux. Bien sûr, il avait eu de longues discussions sur le sujet mais ils lui avaient laissé le champ libre. Ils avaient capitulé, elle avait fait ce pour quoi elle estimait être faite.
« Qu’est-ce que tu aimerais faire, par exemple ? Qu’est-ce que tu aimerais vivre ? »
Elle laisse distraitement son pouce caresser les phalanges de Gil. Elle le connait depuis un bon moment déjà, elle n’a plus peur de ce qu’elle peut ou ne peux pas faire en sa présence. Généralement, elle se sent bien avec lui. Il est différent des personnes coincées avec qui elle se doit de parler de temps à autre, comme les amis de sa mère qui ne parlent généralement que d’art avant de lui lancer, entre deux descriptions de tableaux célèbres, « Alors, Alba, ma chérie. Le mariage, c’est pour bientôt ? ». Elle trouve cette question assassine la plupart du temps et elle se contente de répondre en souriant bêtement. Sûrement font-ils ça pour s’assurer de son célibat, pour se faire une idée. Au cas ils connaîtraient quelqu’un à lui présenter. Elle va rarement à ce genre de rencontres, on dirait un marché. Belles courgettes, belles salades, splendides épis de maïs. L’enfer.
« Tu sais que je suis là, n’est-ce pas ? Si tu veux t’éloigner de tout ça pour quelques temps – même si ce n’est que pour dix minutes. Tu peux m’appeler si tu en as envie. Ou si tu veux passer chez moi, tu peux aussi. Je ne sais pas quoi te dire d’autres, Gil. Je ne peux pas me mettre à ta place, je ne vis pas ce genre de relations avec ma mère. Bien sûr, elle est énervante quand elle s’y met. Mais elle connait mes limites. »
Elle hausse les épaules en soutenant son regard, grimaçant légèrement pour tenter de le faire sourire. S’il sourit, ce sera déjà un bon début.
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« PELAGIA »
| Sujet: Re: Bright. — Alba / mars 125 23.10.15 19:22 par Gil Dylman | Citer Editer Supprimer |
| Il laisse Alba poser sa main sur la sienne, et il hausse simplement les épaules pour répondre à Alba. Vivre autre chose, vivre pour quoi, exactement, il n’en sait rien. Il n’y a, mine de rien, pas grand’chose à faire à Pelagia quand on cherche à sortir de sa routine. On en trouve une autre, au milieu de la cité bulle, nichée sous l’océan, tranquille. Impossible de rêver de grands voyages, de nouveaux horizons à découvrir. Et il n’y a pas encore réfléchi. Il sait juste qu’il aimerait un peu de temps pour faire autre chose que penser continuellement à son statut de lègue et à la famille qu’il est censé fonder selon les conventions de la société. En tout cas celle du niveau 1. Ce niveau 1 l’étouffe, mais il laisse cette pensée dans un coin de sa tête. Le niveau 1 étouffe n’importe qui. Toutes ces belles gens qui sourient et exagèrent doivent être tout aussi étouffées. Le seul avantage de vivre au niveau 1, c’est le confort de vie. Tout le reste n’est qu’un ruban qu’on serre un peu plus autour du cou à chaque regard.
De toute façon, il a levé le nez vers l’immense paroi en verre qui les sépare de la pression de dizaines de tonnes d’eau. Des méduses, des poissons en tous genres ne cessent de passer et repasser. Dans les livres, il y a autre chose, une autre étendue, mais bleue, avec des nuages. Le ciel, c’est comme ça que ça s’appelle dans les livres. S’il devait être honnête, Gil dirait qu’il aimerait du temps pour vivre pour lui-même, pour voir le ciel. Mais il peut toujours rêver. Ça ne se fera pas. Il se remet l’échine droite, son regard descend vers la main d’Alba. Il ne bouge pas la sienne, en fait, il n’a pas envie de la bouger. Il n’a pas envie de rompre le contact de la main d’Alba avec la sienne. C’est agréable. C’est un peu de chaleur dans un monde froid et impitoyable comme est le niveau 1.
Gil acquiesce d’un hochement de tête. Oui, il sait qu’Alba est là. Il la connaît depuis, quand ? Quatre ans, peut-être plus. Il ne se souvient plus vraiment quand leurs parents respectifs ont décidé de les faire se rencontrer, il se souvient juste que c’était pendant une de ces soirées étouffantes, et qu’il était aussi enchanté d’y être que ce soir. Alba avait été une sorte de rayon de lumière au milieu de la jungle des questions agaçantes. « Et le mariage, vous y pensez ? » « C’est pour quand ? » « Vous devriez vous dépêcher avant qu’elles n’aient toutes trouvé quelqu’un ! » Des choses. Ils étaient considérés comme des choses. Juste là pour la société et sa bonne marche.
Gil finit par sourire. La grimace d’Alba lui arrache même un léger rire. Il tourne légèrement sa main pour prendre celle d’Alba, il passe son pouce sur le dos de sa main, en se mordillant légèrement l’intérieur de la lèvre. C’est bizarre. Il se sent bien, avec Alba. Pas de pression. Il sait qu’il n’a pas besoin d’avoir ce masque que la société exige quand ils discutent. Il se racle un peu la gorge, machinalement.
« Hm… »
Un nouveau rire lui échappe, plus nerveux. Il hésite à lâcher la main d’Alba, se mordille la lèvre de plus belle. Bon sang. Il n’aurait pas cru que ce serait aussi compliqué.
« Je… je ne sais absolument pas comment m’y prendre, je dois avoir l’air complètement stupide, mais. Tu me plais. Vraiment. J’aime être avec toi, j’aime discuter avec toi, je sais qu’avec toi je peux être honnête, et j’attends presque ces maudites soirées juste pour te parler, même juste quelques minutes. »
Il lève machinalement son autre main pour se frotter la tempe, passe sa paume sur sa nuque et termine en triturant le tissu de son col. Alba l’avait remis correctement, tant pis. C’est un réflexe, quand il est nerveux, et il se demande s’il l’a déjà été plus qu’à cet instant précis. Qu’est-ce qu’il peut faire d’autre ? L’embrasser, peut-être ?
Voilà, c’est fait. |
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