News — Les groupes : Magnus et La Compagnie sont fermés. Merci de privilégier les autres groupes. Toutes les informations sont présentes ici. News du 21/07 — Mise en place de la mise à jour N°9 juste ici ! Les intrigues sont terminées, le système de quête se simplifie et une nouvelle temporalité verra bientôt le jour. News du 01/05 — Mise en place de la mise à jour N°8 par-là ! News du 01/04 — Mise en place de la mise à jour N°7 par-là ! Apparition du principe des évents ponctuels ainsi que d'un recensement. News du 01/03 — Mise en place de la mise à jour N°6, ici. Plusieurs petites nouveautés HRP à découvrir, et un recensement qui se profile pour le mois prochain ! News du 01/02 — Mise en place de la mise à jour N°5, ici. Nous recherchons un animateur n'hésitez pas à postuler ! Découvrez un nouveau système de jeu, en vous rendant là. News du 15/01 — Les intrigues sont lancées ! Pour en savoir plus rendez-vous ici. News du 01/01 — Mise en place de la mise à jour N°4, ici. Les intrigues de l'an 125 débute à Pelagia. Découvrez un nouveau système de jeu, ici. News du 01/12 — Mise en place de la mise à jour N°3, ici. Vous retrouverez des jeux et un nouvel univers, ici. News du 05/11 — Mise en place d'un mini-évent par le membre Siobhán Balfe. Rendez-vous ici ! News du 01/11 — Mise en place de la mise à jour N°2, ici. Vous retrouverez une tombola, ici. Ainsi que la mise en place de divers jeux sur la CB ! News du 15/10 — Réouverture d'Escalus après 1 an d'absence !
Il n’aurait pas pu rêver plus bête. Vraiment pas. Il pouvait tout du moins se dire qu’aucun des appareils électriques peuplant son appartement n’avait décidé de griller et de l’emmener avec dans ce merveilleux voyage, et tous ses livres étaient intacts. Aucun n’avait pris l’eau. Il soupira un peu, rajustant la lanière de son sac de voyage sur son épaule. Il était parti pour des jours entiers de pur bonheur chez quelqu’un qu’il aurait préféré éviter encore un peu plus avant de venir frapper à sa porte. Adélaïde allait être vraiment ravie d’apprendre qu’il fallait le temps que le parquet sèche et que les travaux à faire soient faits pour qu’il dégage de chez elle. Un ricanement sec lui échappa. Ces jours de squat forcé chez la jeune femme allaient être les plus beaux et les plus longs de sa vie. Il ne savait pas ce qu’il craignait le plus entre le réveil douche froide ou le coup du matelas retourné. Et encore, il le savait très bien : Adélaïde était capable de bien pire.
Surtout quand il était question de lui mener la vie dure. Le sac pesait lourd sur son épaule. Il avait emmené assez d’affaires pour pouvoir rester une quinzaine de jours, même s’il espérait que ça ne dépasserait une semaine. Ne serait-ce que pour éviter de pousser Adélaïde dans les premiers escaliers qu’il verrait, de lui abattre quelque chose sur la tête pour l’assommer avant de la bâillonner et de la ligoter à une chaise. Chose qu’elle vengerait au centuple à peine libérée, donc l’idée ne le tentait pas plus que ça, en fait. A peu près autant que de devoir frapper chez Adélaïde et s’attendre à devoir se faire un campement dehors, devant la porte, en attendant qu’elle ouvre.
Et d’ailleurs, en parlant de la porte d’Adélaïde, il se retrouvait juste devant. Nouveau soupir. Il n’avait absolument pas envie de frapper contre le battant. Un coup d’œil à sa montre lui apprit qu’il était déjà vingt heures. C’était encore raisonnable pour frapper chez quelqu’un. Ce qu’il finit par faire, parce qu’il n’avait pas non plus envie d’hésiter et de poireauter là toute la soirée. En attendant qu’elle vienne lui ouvrir, il retira son sac de son épaule et le posa par terre. Quelle idée d’emmener quelques bouquins. Mais il lui fallait au moins ça pour tenir chez Adélaïde plus de vingt-quatre heures : des vieux bouquins parlant de vieux trucs.
L’avantage, c’est qu’il savait déjà, au moins, comment annoncer à Adélaïde qu’elle allait avoir un invité surprise de longue durée.
es plus belles surprises sont les plus inattendues. Mais les imprévus sont souvent contraignants, il nous pousse à faire des concessions, à réfléchir sur la question. Allongée dans son lit, Adélaïde ne réfléchissait à rien de tout ça. Elle ne dormait pas, les yeux grands ouverts quoique vaporeux, fixant un point invisible parmi les tâches lumineuses qu’inventait sa vision. Le temps lui semblait long, ingrat tout comme son corps refusant de faire un quelconque mouvement. La boîte de médicaments entre les doigts, elle secoua celle-ci d’un air las. Ce traitement était sûrement le plus efficace de tous. Mais il était aussi malheureusement le plus assommant.
Si bien que lorsqu’on sonna, elle fût nullement étonnée. Se relevant doucement avec une lenteur presque insupportable, même pour elle, Adélaïde alla jusqu’à la porte, collant son front sur la surface froide pour regarder dans le mouchard qui était là. Haussant un sourcil en apercevant Gil, elle prit le temps d’aller chercher son portable, elle n’avait pas l’impression de l’avoir appelé. Vérifiant rapidement l’historique, elle remarqua que rien de tout ça ne s’était passé. L’air un peu perplexe, elle prit le temps — à nouveau — de réfléchir à un quelconque reproche, quelque chose d’assez gros et important pour qu’il se déplace en personne.
Se grattant le haut de la tête nonchalamment, elle alla finalement ouvrir, sentant que les choses allaient mal se passer. Elle n’était pas en état de se disputer, elle le savait. Ni l’envie, ni la force et encore moins les capacités. Ouvrant doucement la porte, elle entrouvrit celle-ci, faisant apparaître son visage dans l’entrebâillement. Elle le toisa quelques secondes avant d’esquisser un rapide sourire qui mit un temps infini à s’effacer. « Hey. » Elle le sondait en quelques sortes. Le temps d’avoir analysé l’expression de son visage, la posture de son corps, elle se permit d’ouvrir davantage. Pas de contrariétés dans l’air. Dû moins, pour le moment.
« Qu’est-ce que t-… » Se coupant elle-même dans son élan — un effort incommensurable —, ses yeux bleus entrèrent en collision avec le sac qui lui semblait infiniment lourd. Quelques secondes de réflexions accompagnés de sourcils légèrement froncés dans une moue pensive l’aidèrent à comprendre un peu mieux la situation. « Qu’est-ce qui se passe? Ça va? » Sûrement la première fois qu’elle prononçait cette phrase en sa présence sur un ton si compatissant et sincère. Gil était avant tout un ami, avant d’être un souffre douleur, bien que cela ne se voit pas constamment. « Entre, entre. » Lui faisant signe d’entrer, elle referma calmement derrière lui, regardant le sac qu’elle sondait d’un air songeur pour deviner son poids. Assez lourd apparemment.
S’asseyant sur le dossier d’une canapé, elle le regarda quelque peu hébété. Tout cela l’étonnait finalement. Elle qui ne s’était étonnée de rien depuis ce début de soirée se retrouver curieuse face à la situation. Il était venu spontanément, ils n’avaient pas criés, pas un mot plus haut que l’autre. Et elle se prenait même à être gentille avec lui. « Dis moi tout. » Finit-elle par dire, les sourcils haussés.
Il était blasé. C’était le moins qu’on pouvait dire. Il n’avait toujours pas plus envie que ça de devoir passer quelques jours chez Adélaïde. Il s’attendait toujours au pire, venant d’elle, même si ce soir, elle avait particulièrement l’air dans les vapes. D’un côté, c’était tant mieux, il aurait au moins la paix cette nuit. De l’autre, ça lui était un peu égal qu’elle ait cet air absent. Pourtant, il se demandait ce qui pouvait provoquer chez elle ce regard brumeux. Il ne lui poserait pas la question ce soir. Il préférait éviter tout sujet de dispute, quel qu’il soit, et ça commençait par éviter de creuser trop profond du côté de la vie privée. En toute réponse à la question d’Adélaïde, il haussa les épaules. Ce n’était ni oui, ni non. Il n’avait pas envie de se perdre dans une phrase de dizaines de mots juste pour lui dire qu’il avait envie de se barrer d’ici, d’être le plus loin d’elle possible sans pour autant pouvoir rentrer chez lui, puisque son appartement avait failli ressembler à une piscine et qu’il aurait pu perdre pour des milliers de couronnes de vieux bouquins achetés en brocantes ou en librairies spécialisées.
Il récupéra son sac avant d’entrer, regrettant de le reposer sur son épaule. Il le laissa simplement tomber à côté du canapé, en se massant un peu la clavicule, bougeant l’épaule pour faire partir l’impression de tiraillement qui avait décidé de s’y installer depuis qu’il avait tourné vers la maison d’Adélaïde. Un soupir lui échappa. Il avait tout simplement envie de se laisser tomber au sol et d’y rester, d’y dormir même tant qu’à faire, mais il restait debout. Il se mit à fixer Adélaïde, toujours aussi blasé.
« Mon appartement a failli ressembler à un aquarium. »
Ç’avait le mérite d’être clair, même avec la voix ternie qu’il avait ce soir. Oui. Son appartement avait failli ressembler au monde de Nemo, avec quelques vieilleries pour décorer la boîte en verre. Il finit par venir s’installer sur le canapé, à côté d’Ade qui avait préféré le dossier. Il renversa la nuque en arrière et ferma les yeux. Il avait encore moins envie de réfléchir et ne pas se mettre à parler en suédois allait sans doute se révéler un tantinet compliqué. Et long. Il était obligé d’aller chercher ses mots et de construire correctement la phrase dans sa tête avant de la prononcer.
« Il y en a pour au moins une semaine de travaux dans tout l’immeuble le temps que le parquet sèche, de vérifier les installations, qu’il n’y a pas d’infiltrations ni de problèmes d’humidité résiduelle… »
Nouveau soupir. Tout ça à cause d’une fuite chez le voisin du dessus. Qui était allée contaminer tous les appartements en-dessous, même trois étages plus bas.
« … En gros je viens squatter chez toi le temps que ce soit fait parce que dormir dehors ça m’intéresse pas vraiment comme expérience. »
D’autant qu’ils prévoyaient de la pluie pour les jours à venir. Son parquet allait vachement sécher avec ça, tiens.
délaïde hochait la tête à ses paroles, elle imaginait bien la situation dans laquelle il était. C’était embêtant voir rageant. Un lieu personnel, intime, une sorte de havre dans lequel il pouvait enfin se poser le soir, venait d’être inondé. Et malgré toute la compassion du monde, la jeune femme ne sut quoi dire. Sûrement un manque d’intérêt car bien qu’elle l’apprécie réellement, elle avait du mal à le plaindre. Tout ce qu’elle su dire fût une simple phrase sur un ton posé mais au fond sarcastique. « Ah. Chiant. »
S’humectant les lèvres, elle finit par se lever, l’air de rien et alla dans sa chambre cherchait de quoi lui constituer un lit confortable. Malgré un manque d’intérêt certain, elle ne souhaitait pas qu’il déteste le lieu où il allait rester une semaine. Revenant les bras chargés, elle déposa de quoi constituer un lit. « Lève-toi. » Poussant du bout du pied son sac, elle se mit à installer le tout. Une couette, des oreilles, à tenter d’agrandir la chose puisqu’il était relativement grand. Une fois le tout mis en place, elle esquissa un rapide sourire par pure politesse, nullement sympathique. « Voilà. »
Poussant un soupir, elle retourna dans sa chambre, fermant la porte comme si elle était seule chez elle, ignorant à nouveau la présence de Gil. S’allongeant, elle ferma les yeux durant quelques secondes. Et elle se rendit compte qu’elle ne lui avait rien proposé à boire ou à manger. Ressortant de sa chambre l’air las, elle alla le voir. « Tu veux boire ou manger quelque chose? » Se dirigeant vers la cuisine, elle se servit un verre d’eau en attendant sa réponse, réfléchissant rapidement à ce que cela impliquait qu’il reste ici.
Ça ne l’arrangeait pas, clairement. Ce n’était pas une question de pratique ou autre. Elle appréciait simplement sa solitude personnelle, autant que lui. Et elle n’avait pas envie, une fois le soir venue après une longue journée de devoir se sentir forcée de faire la conversation ou même de l’ignorer. Ça aurait été un comportement déplacé face à un invité. Et bien que cet invité soit Gil, il restait aussi cette personne avec qui elle ne pouvait rester calme plus que quelques minutes. Alors elle lança la première solution qui lui traversa l’esprit.
« Je vais sûrement rentrer tard ces prochains temps. Voir pas du tout parfois. Donc fais comme chez toi. Enfin pas trop quand même, faudrait pas voir à déconner. » Adélaïde ou la gentillesse incarnée. Puis une pensée lui traversa l’esprit, l’air pensive. « Dis moi. Pourquoi être venu ici? »
Il n’avait pas vraiment envie de se lever du canapé, maintenant qu’il y était installé. A la réflexion, il aurait sans doute mieux fait de ne pas s’y asseoir du tout, ça lui aurait évité de ne pas avoir envie d’en bouger. Mais plutôt que de protester, chose dont il n’avait ni envie ni la force de le faire, il se leva et laissa Adélaïde transformer le meuble en lit d’appoint. C’était déjà mieux que rien. Une semaine. Pour quelques jours, il pouvait bien dormir sur le canapé. Et de toute manière, il n’aurait sans doute pas voulu dormir ailleurs. Et il n’aurait pas pu dormir ailleurs, en plus. Il dégagea légèrement le sac et l’ouvrit pour en sortir un de ses vieux bouquins qu’il avait emmenés pour passer le temps chez Adélaïde. Il commença à la feuilleter, distraitement. Il se sentait épuisé sans pour autant avoir sommeil. Il avait plutôt l’impression d’avoir marché pendant des jours avec ce sac lourd à lui déboîter la clavicule posé sur l’épaule, prêt à faire céder ses tendons à tout moment. Au moins, il avait une semaine avant de devoir se le retrimbaler en sens inverse.
De toute manière, Adélaïde avait l’air décidée à s’enfermer dans sa chambre. Il ne savait pas vraiment si c’était une bonne idée, mais si ça leur permettait au moins d’éviter de s’entretuer, ou d’essayer de s’entretuer, toute la soirée, c’était au moins ça de pris, et il ne lui en voulait pas de vouloir s’isoler un peu. Ce n’était jamais drôle de voir quelqu’un débarquer dans son cocon à l’improviste. Il releva la tête de son bouquin, s’apprêtant à tourner une page, quand il entendit la jeune femme lui parler. Pour répondre à sa question, il secoua la tête.
« Non merci, ça va. »
Il tourna la page de son livre et se remit à le feuilleter, toujours avec le même air un peu absent. Il réfléchissait à ce qu’allait sûrement être sa vie avec Ade sous le même toit pendant au moins une semaine. Et il espérait que ça ne serait qu’une semaine, parce qu’il ne se voyait pas tenir plus longtemps, et il doutait qu’Adélaïde puisse le faire aussi. Ça risquait de finir avec un placard, un tire-bouchon, et peut-être même un stylo bille. Et quelques flaques de sang, les connaissant.
Il haussa légèrement les épaules.
« Ne t’inquiètes pas, je nettoie derrière-moi, je ne laisse pas mes cheveux traîner dans le siphon et si tu veux que je passe un coup de balai tu me laisses un mot et je le ferai. »
Il continuait de feuilleter son livre. Il ne savait pas si Adélaïde allait le croire ou pas, mais restait qu’il était sincère. Il y avait certaines choses qu’il détestait de certains invités et qu’il avait pu expérimenter sur le terrain universitaire, et il n’était pas du genre à les reproduire juste pour emmerder quelqu’un. Même si emmerder Ade était quelque chose de très tentant, il n’allait pas s’y prendre en laissant la poussière s’entasser. Et il releva la tête pour planter son regard dans celui de la jeune femme, refermant son livre avec un petit claquement sec, avant de soupirer doucement.
« Parce que tu es la seule personne, en dehors des clients qui doivent se faire livrer une pièce de grande taille de ma boutique, dont je connais l’adresse. »
Il posa le livre sur un des accoudoirs du canapé, et soupira à nouveau.
« Vraiment désolé de m’incruster comme ça mais je t’avoue que tu es ma destination de secours… »
a dernière phrase la laissa quelques instants perplexes, la faisant s’arrêter net dans ses activités. Bloquant son corps dans sa position, elle releva simplement la tête en une expression à la fois intriguée et quelque peu condescendante. C’était étonnant de l’entendre dire ça sur un ton aussi sincère. C’en était inhabituel, inespéré. Tellement que pendant quelques secondes, elle le fixa, clignant simplement parfois des yeux avant de se remettre mécaniquement à faire ce qu’elle faisait, haussant les sourcils dans une expression d’étonnement. « … C’est normal. » Finit-elle par lâcher, n’ayant pas l’habitude de lui balancer des gentillesses fleuries et suaves au visage.
« T’es ma bouée le reste du temps si de temps en temps j’peux être la tienne, vas-y, coule-moi. » Elle-même étonnée par la tournure qu’avait pris sa phrase, elle se la répéta plusieurs fois dans sa tête. Coule-moi. Finalement, c’était assez juste. Étouffe-moi dans mon quotidien, noie mes habitudes, étrangle mes mauvais côtés si tu veux prendre le dessus pour te sortir la tête hors de l’eau. Le tout avec joie.
Posant le verre dans l’évier, elle ne sut trop quoi faire. Restant quelques secondes immobiles, elle finit par retraverser le salon, allant dans sa chambre. Et avant de rentrer, elle adressa un léger sourire à Gil. « Bonne nuit. » La nuit fût longue et le sommeil lourd. Les médicaments aidant, Adélaïde se réveilla un peu plus tard que d’habitude. Mais elle ne s’offusqua pas face à l’heure qu’affichait son réveil. Elle avait ses propres horaires de toute façon, que ça soit à la F.F.O.V ou chez les Conciliateurs.
Soupirant, elle se leva nonchalamment, traversant le salon. C’est en s’asseyant sur le comptoir de la cuisine pour boire la bouteille de jus d’orange à même le goulot que sa vision entra en collision avec le canapé-lit, cherchant soudainement Gil du regard.
Il répondit plus à la porte qu’à Adélaïde. Le temps qu’il réagisse, la jeune femme avait déjà fermé sa porte. De toute manière, elle aurait sans doute mis un moment à comprendre le « godnatt » dont il l’avait gratifiée, avec ce sourire machinal. Il soupira un peu, et envoya le livre rejoindre ses congénères au fond du sac avant de se préparer pour dormir. Il ne tira pas les rideaux des fenêtres, de toute manière, la lumière ne l’avait jamais vraiment dérangé pour dormir. Il espérait juste qu’Adélaïde n’allait pas profiter de son sommeil pour une mauvaise blague quelconque. Il réfléchissait encore un peu au « coule-moi » qu’elle avait formulé. C’était assez étrange, en y repensant. Ce soir-là, loin de lui l’idée de la couler, justement. Une autre fois, certainement.
« Quel foutoir… »
Finalement il abandonna l’idée d’avoir une explication claire et il remonta la couverture jusqu’à son cou en fermant les yeux.
La lumière que les fenêtres laissaient diffuser ne le faisait pas ciller. C’était le matin, et alors ? Il dormait encore, et ce n’était pas l’heure qui allait le déranger. Il avait décidé la veille au soir, en partant de chez lui, qu’il n’irait pas bosser pendant quelques jours. C’était sans doute un peu plus pratique comme ça, et ça lui éviterait aussi de se retrouver dehors quand Adélaïde ne rentrerait pas le soir. Elle fermait sûrement la porte à clef. Et il ne s’était jamais attendu à ce qu’elle lui tende un double avec un sourire bienveillant.
Il entendait vaguement du bruit, mais avait purement et simplement la flemme d’ouvrir les yeux et de sortir de cette espèce de chape un peu cotonneuse dans laquelle il était installé. L’oreiller sous sa tête et la couette sur son corps, il les sentait parfaitement. La chaleur de la lumière du soleil, le bruit d’une porte qui s’ouvre étaient parfaitement perceptibles. Mais il n’ouvrait pas les yeux, il continuait de nager dans cette somnolence absente qui n’était pas du tout désagréable. En revanche ce fut le regard doucement posé sur sa nuque qui lui fit ouvrir les yeux.
Il avait vaguement l’impression d’avoir passé des heures partout sauf dans un canapé transformé en lit. En guise de bonjour, il adressa un léger signe de la main à Adélaïde. En tout cas, la tête encore à moitié dans l’oreiller, il espérait que c’était bien Adélaïde.
a jeune femme retînt un rire en voyant la mine encore ensommeillée de Gil, le regardant secouer la main en guise de bonjour. C’était assez drôle de le voir le matin au réveil, les yeux encore rétrécit par la fatigué et les cheveux en pagaille, l’air de rien, dans une nonchalance que n’importe quelle personne possède au réveil. « Hey. » Dit-elle à voix basse, s’amusant de la situation. Se dirigeant vers la cuisine, elle sortit une tasse pour se faire un café, décidant qu’elle ne partirait pas d’ici avant un certain temps. Elle n’avait pas envie de se presser pour aller s’enfermer.
Gil venant de se réveiller, elle lui laissa le temps, ne lui sauta pas à la gorge s’il désirait boire ou manger quelque chose. Elle faisait les choses de son côté, laissant sortit quelques éléments n’ayant pas besoin d’être réfrigérés tel qu’une tasse, une cuillère, un bol, thé, café, tout le panel entre autre. Il ne se sentirait pas perdu au moins. Enfilant un pantalon ainsi qu’un sweat, elle sortit à l’extérieur, les cheveux négligemment attachés en un chignon broussailleux. C’était la balade du matin, au pas de course. Et lorsqu’elle en avait assez de trottinait, elle se mettait à courir, prenait une grande pente et ne s’arrêtait que lorsque l’air lui manquait.
Revenant chez elle en sueurs, elle soupira, aimant ces matins où elle prenait le temps. Le temps de ne rien faire de spécialement productif mais qui l’aidait à se préparer. Gil avait dû se réveiller depuis. « Tu pars pas travailler? » Lui lança-t-elle tandis qu’elle claquait la porte derrière elle, marchant d’un pas pressé vers son frigo pour en tirer une bouteille d’eau. « Tu me fais une dépression ou? »
Il marmonna une réponse à Adélaïde, un léger « hej » à moitié réveillé. Il avait envie de refermer les yeux et de se rendormir. L’idée était tentante, passer la journée à ne rien faire d’autre que la larve sur ce canapé était quelque chose de plutôt intéressant, également. Mais il n’avait pas vraiment l’habitude de traîner de cette manière. Une fois qu’il était réveillé, il était réveillé. Il bâilla un peu. Même s’il avait encore le cerveau ralenti par les restes de sommeil qui lui collaient aux yeux, il savait qu’il n’allait jamais rester toute la journée à ne rien faire sur ce canapé. Lire, ce n’est pas rien faire, n’est-ce pas ? Le temps qu’il se réveille correctement, la porte de l’entrée venait de claquer. Adélaïde était partie, pour quoi, il n’en avait pas la moindre idée, mais ça ne le dérangeait pas. Elle faisait ce qu’elle voulait de sa vie. Et en attendant, il allait faire la sienne de son côté, à commencer par plier les draps et laisser de la place sur le canapé avant d’aller prendre une douche.
Après seulement il s’accorda un café pour finir de se réveiller, alors qu’Adélaïde rentrait tout juste. Il la gratifia d’un signe de tête, en sirotant tranquillement sa tasse. Quand elle lui posa une question, il ne répondit pas tout de suite. Il prit le temps de choisir et de peser ses mots avant de formuler une réponse qui lui semblait satisfaisante.
« Non, rassure-toi. C’est juste que j’ai décidé de fermer la boutique jusqu’à être revenu chez moi parce qu’il y a deux-trois bricoles dont j’aurais besoin qui sont restées là-bas, et que je ne peux plus aller chercher. »
Il posa sa tasse à moitié vide sur le plan de travail, désigna le sac de la tête.
« Et j’avais pas envie de te demander de me reboîter l’épaule en arrivant. »
Il reprit la tasse et la finit, tranquillement. Dépression, non. Vague de flemme intense, très sûrement. Il haussa les épaules pour finir. Il trouvait ça presque étonnant qu’Adélaïde pose la question, comme si elle avait quelque chose à faire avec. D’un côté, elle avait déjà été bizarre la veille, alors bon. Il n’allait pas creuser le sujet plus loin, ça n’allait rien amener d’autre qu’une de leurs légendaires engueulades. A la place il lui posa une question toute bête.
« Au fait, tu rentres ou pas, ce soir ? Juste que je sache si je cuisine pour deux ou pas. »
ochant pensivement la tête, elle esquissa un sourire. Il ne faisait pas une dépression, c’était déjà ça. Car pour que Gil vienne un soir et décide qu’il resterait la semaine, la jeune femme s’était imaginé un milliers de scénarios. Comme rassurée, elle vînt l’enlacer, passant ses bras autour de son torse pour les refermer dans son dos.
« Ça va alors. »
Se retirant au bout de quelques secondes, elle alla vers la cuisine se faire un café l’air de rien, comme si ce qu’il venait de se passer était normal. « Et pour ce soir, je pense rentrer si tu fais à manger. » Drôle de condition, il fallait l’avouer. Se servant une tasse, elle la sirota rapidement avant de se diriger vers la salle de bain pour prendre une douche. Lorsqu’elle ressortit, elle était coiffée, maquillée, habillée pour se rendre à la F.F.O.V n’ayant rien à voir avec la jeune femme en jogging qui avait passée la porte ce matin les yeux encore endormis.
« J’y vais. » Lâcha-t-elle pensivement avant de claquer la porte. C’était étrange d’avoir une présence dans cette maison. Elle était habituée à une certaine solitude alors le fait qu’il y ait quelqu’un lui arrachait un drôle de sentiment. C’était étrange. On empiétait sur son quotidien, sur son territoire et en même le temps, le geste n’était ni violent, ni agaçant. C’était comme une invasion pacifique, quelque chose se faisant en douceur.
Adélaïde rentra un peu plus tôt que d’habitude en sachant qu’il y avait quelqu’un chez elle le soir venu, curieuse de voir Gil à l’œuvre. Elle était partie ce matin l’esprit léger mais elle avait eu le temps tout au long de la journée de se rappeler des spécialités suédoises qu’il lui avait fait goûté la dernière fois, craignant dorénavant le repas du soir. Elle espérait que ça ne serait pas aussi spécial.
Posant son sac dans l’entrée, elle retira ses chaussures, ouvrant les premiers boutons de sa chemise, détachant ses cheveux. « Hey la larve. » Lança-t-elle en souriant à Gil. Elle alla dans la salle de bain pour se laver les mains après avoir pris le bateau, allant s’asseoir sur son canapé. « Je suis pas mécontente d’être rentrée. » Soupira-telle, s’étirant. C’est une vingtaine de minutes plus tard qu’on sonna à la porte. N’attendant personne, Adélaïde alla ouvrir prudemment, regardant avant tout dans le mouchard. Voyant les cheveux roux de Cornelia, la jeune femme fit la grimace derrière sa porte.
C’était tout sauf le moment. Crispant ses poings, elle réfléchit rapidement à une excuse et ouvrit la porte avant même d’en avoir une en tête. « Hey. » Une rapide salutation gênée sans marquer de pause car elle se dépêcha d’enchaîner rapidement la suite. « Qu’est-ce que tu fais là? »
Le geste d’Adélaïde l’avait vraiment surpris. Jamais il ne l’aurait imaginée faire ça. Pas de son vivant, en tout cas, si l’on pouvait dire. Il ne s’était absolument pas attendu à quelque chose de tel. Pour être honnête, il n’aurait jamais cru la jeune femme capable d’un geste pareil. Une telle marque d’affection de la jeune femme était plus qu’étonnant. Il se demandait même s’il ne déraillait pas un peu, pour le coup. A moitié plongé dans son bouquin depuis qu’elle était partie, il réfléchissait sur ce qui avait pu pousser Adélaïde à esquisser ce geste. Il avait beau chercher, il ne voyait pas vraiment ce qui aurait pu justifier quelque chose de ce genre. Un soupir lui échappa et il décida d’arrêter de se casser la tête sur la question et de finir son livre pendant qu’il en avait le temps. Après tout, ce n’était pas non plus la fin du monde.
Le temps était passé vite. Plus vite qu’il ne l’aurait cru. Ce fut en levant la tête pour regarder l’heure qu’il s’en rendit compte. Il était temps de se bouger, d’autant qu’il faisait la cuisine, ce soir-là. Il délaissa donc son bouquin sur l’accoudoir du canapé et entreprit de faire un rapide inventaire de la cuisine avant de chercher une idée quelconque. Il sourit un peu en se rappelant la tête qu’Adélaïde avait faite en goûtant les réglisses salées, et il opta pour quelque chose de plus commun. De moins suédois. Même s’il était un peu déçu de ne pas trouver d’aneth avec les autres quelques herbes aromatiques qui occupaient une des étagères d’un des placards. Tant pis. De toute façon pour ce qu’il comptait faire il n’en avait pas vraiment besoin.
« Hej. »
Il surveillait tranquillement la cuisson quand Adélaïde revint. Un coup d’œil à sa montre lui apprit qu’il n’était pas encore vingt heures. Il était remis à bouquiner, gardant un œil sur la casserole. Il leva légèrement la tête et jeta un coup d’œil à son hôte.
« Je te rassure je n’ai pas ramené de réglisse salée à faire fondre pour l’ajouter au reste. »
Du reste, autant qu’il s’en souvienne, les spécialités suédoises concernant ce qui est salé dans le reste du monde ne sont pas si étranges que ça. A moins que des patates sautées avec des dés de viande soit quelque chose de vraiment étrange, mais bizarrement, il en doutait.
Il était occupé à chercher un plat pour y mettre le dîner quand on sonna à la porte. Il arqua légèrement un sourcil, déportant son attention du placard dans lequel il était en train de chercher. Il laissa Adélaïde aller jusqu’à la porte. C’était sa maison, donc à elle de gérer qui viendrait frapper contre la porte ou non. De ce qu’il pouvait entendre depuis la cuisine, la personne qui était venue sonner n’était pas venue au bon moment. Si tant était qu’il y ait un bon moment avec Adélaïde. Tout ce qu’il espérait, c’était que ça n’allait pas lui retomber dessus par la suite.
En tout cas, il n’était pas vraiment décidé à quitter son coin de mur en attendant. Ici, au moins, il passait encore inaperçu.
Elle avait réservée une petite surprise à Adélaïde, petite tenu sexy caché sous un trench et elle se rendait chez elle avec sa petite culotte dans sa poche. Direction sa maison, qui n’était pas très loin de la sienne, elle frappa à la porte d’entrée et on lui ouvrit. Un sourire sur les lèvres s’affichait sur le faciès de la rouquine, tandis que la brunette était plutôt gêné qu’autre chose, elle s’approche doucement, mais on lui fait barrage. Alors elle soupire.
- Salut petites fesses. Je suis là pour t’offrir un cours en bonne et due forme.
Elle se mordait les lèvres et tout en s’humectant les lèvres, et elle décrit sous toutes les coutures la brunette. Et elle penchait la tête sur le côté en commençant à défaire son trench, lentement, comme si elle était un papier cadeau. La ceinture et elle commençait même à enlever un bouton. Tout ça pour lui faire comprendre qu’elle était en sous-vêtements, sous son manteau. Mais elle se ravisa très vite en entendant quelqu’un parler.
- Il y a un mec chez toi ? C’est qui celui-ci.
Elle passa la tête par-dessus le battant de la porte et elle tordait le cou pour voir ce qui se passait derrière la porte d’entrée et elle posait même la main sur celle d’Adélaïde. Et elle fronçait les sourcils.
délaïde était mal à l’aise. S’humectant nerveusement les lèvres, elle abaissa son regard sur ce que Cornelia comptait lui offrir ce soir. C’était en soit une jolie surprise. Mais la jeune femme n’était ni seule, ni disponible et après la soirée passée, elle se demandait finalement si tout cela n’avait pas été une simple erreur. Trop d’alcool, un concours de circonstances incertain. Des excuses avec lesquelles elle se rassurait entre autre. Mais c’en était fini pour le moment. Malgré un moment très agréable digne d’un fantasme — dans les toilettes d’un restaurant — les tics et comportement étrange de Cornelia ne lui avait pas échappé.
Et ce qui auparavant l’avait attirée — en toute amitié — chez elle, devenait maintenant une gêne. Se crispant lorsqu’elle entendit Gil parler, elle ferma les yeux quelques instants, resserrant son emprise sur la poignée de porte. Elle ne la laisserait pas entrer. « C’est rien. » Dit-elle rapidement, sortant à l’extérieur tout en fermant la porte derrière elle. Elle ne voulait pas que Gil assiste à ça.
« Écoute. » Dit-elle simplement en s’éclaircissant la voix, voulant à tout prix minimiser les choses. « Je recueille un ami le temps d’une semaine. Son appartement a été inondé, il avait besoin d’un lieu où rester, il a débarqué un soir. » Marquant une pause, elle la regarda, voulant bien lui faire comprendre. « C’est un ami. » La faisant reculer pour qu’elles quittent le pas de porte de quelques mètres, elle réfléchit rapidement.
« Dans tout les cas Corn… Même si ça avait été quelqu’un de plus intime, ça ne changerait rien. C’était… Très excitant mais j’ai pas envie de continuer sur cette voie. » Se mordant les lèvres, elle se tourna rapidement vers la fenêtre, espérant voir quelque chose de rassurant. « Je vais y aller. Et tu ferais mieux d’en faire de même. Tu… vas attraper froid dans cette tenue. » Ajouta-t-elle pensivement. Puis mal à l’aise, elle fouilla les poches de son habit, cherchant un peu de liquide. « Je peux te payer le bateau pour le retour si tu veux. »
La porte de l’entrée avait de nouveau claqué. Il posa le plat sur le plan de travail et s’éloigna légèrement de la fenêtre de la cuisine. Adélaïde était assez grande pour gérer ce genre de choses, et il n’allait de toute manière pas s’en mêler. Il soupira légèrement, retourna prendre son livre et s’adossa à un mur pour continuer de le lire, distraitement. Ce n’était pas la peine d’essayer d’écouter, de là où il était, Adélaïde et l’invitée surprise étant dehors, il n’entendrait strictement rien. Et avec son bol habituel, s’il essayait de s’approcher, Ade ouvrirait la porte à ce moment-là. Et elle était foutue de lui casser le nez une seconde fois. Ce qu’il se passait de l’autre côté de ce panneau en bois ne l’intéressait qu’à moitié. Il se demandait pourquoi Adélaïde avait préféré aller discuter dehors, il se demandait qui était cette inconnue qui avait débarqué.
Le pourquoi, il s’en foutait. Ça faisait uniquement partie de la vie privée d’Adélaïde et il ne s’en mêlerait pas.
Il attendait simplement que le temps passe et qu’Adélaïde franchisse à nouveau le pas de la porte. Il lui aurait bien proposé de s’en aller, pour la laisser tranquille, malheureusement, il n’avait aucune idée d’où aller après. Il ne connaissait pas vraiment d’adresse à laquelle se rendre ; à part celle de Pio, mais il savait que son cher client amateur de tapis amasse-poussière n’allait certainement pas lui ouvrir sa porte, et surtout pas à plus de vingt heures. C’était une destination à exclure.
Il ne leva pas son nez du livre quand il entendit de nouveau la porte s’ouvrir et se fermer. Il tourna nonchalamment une page, ses yeux suivant les lignes et se fixant brièvement sur les mots.
« Livet tar det livet ger. »
Ça n’avait probablement aucun rapport avec le reste, mais c’était la seule phrase qui lui venait à l’esprit.
Elle se faisait virer presque de chez elle, alors qu’elle n’avait même pas invité. Elle croisait ses bras sous sa poitrine, en tapant du pied avec ses talons hauts contre le sol, signe qu’elle commençait vraiment à perdre plus que ça patience. Elle n’écoutait qu’à demi-mot ses propos, et elle cherchait toujours à savoir qui était à l’intérieur et qu’est-ce qu’il faisait.
- Mouais un ami…
Elle fronçait les sourcils, en braquant un regard noir sur Adélaïde, et elle avançait d’un pas puis de deux vers elle. S’approchant dangereusement, d’elle, mais ne se jetant tout de même pas dessus. Sa langue claqua contre son palais, laissant un bruit résonner dans sa cavité buccale.
- A d’autre. Tu vois le fait de te mordre les lèvres ça signifie tout autre chose. Et rappelle-moi qui voulais se faire baiser contre le mur dehors ?
Elle marquait un temps de pause, en se tapotant le menton comme si elle faisait mine de réfléchir, et quand trente seconde était passé, elle le dirigeait vers elle.
- Ah oui. Toi. Adélaïde Jagaciak. Madame parfaite, qui cherche à tout prix à sauver la face.
Elle pouffa de rire, en plantant ses mains sur ses hanches, et en faisant un peu les cents pas devant la maison de la brunette.
- T’étais plus accommandante dans les toilettes. Et ose me dire que tu n’avais pas aimé ça.
Elle lui avait laissé une dernière chance, mais tout de suite, Adélaïde fouillait dans ses poches, ce qui surprenait quelque peu Cornelia qui fronçait des sourcils, et elle ouvrit la bouche en un grand « O », quand elle y vu les billets. Et juste avant qu’elle les lui tend, elle cracha à terre, juste au pied d’Adélaïde.
- Tu les donneras à ta pute qui se trouve à l’intérieur. Mais sache que ce n’est pas fini.
Et elle tournait les talons, bien décidé à rebrousser chemin.
omme elle l’avait sentit venir, Cornelia le prenait mal. Très mal. « Évidemment que j’ai aimé, c’est pas ça le problème! » Se justifia-t-elle, n’appréciant ni le comportement, ni le ton employé par la rouquine. Elle ne lui était pas supérieur, elle ne lui appartenait pas. Par conséquent, les dires de la jeune femme l’agaçait avec agressivité. Rangeant ses billets dans sa poche, elle la regarda partir, fronçant les sourcils lors de sa dernière phrase.
« Si c’est fini Cornelia. Et ne me menace pas! »
Soupirant, elle passa sa main dans ses cheveux. Elle avait un nouveau problème sur le dos. Mais celui-ci, elle le savait, serait lourd à supporter. Rentrant à l’intérieur, elle fixa le sol quelques instants, le regard perdu dans le vague. Gil avait dit quelque chose, mais elle ne l’avait pas compris. Car elle n’écoutait pas vraiment. Elle était trop absorbée par la dernière phrase de la rouquine. Elle l’avait vu à son comportement, à ses dires, que cette phrase n’était pas anodine. Elle savait qu’elle le payerait.
Passant ses mains sur son visage, elle se dirigea vers la cuisine, regardant le plat. « Je vais mettre la table. On va pouvoir manger. » Sans revenir sur les éléments précédents, elle plaça deux assiettes ainsi que des couverts et des verres, posant le plat sur un dessous. Servant l’assiette de Gil, elle en fit de même pour la sienne, se mettant à manger silencieusement. Mais pendant qu’elle mâchait, ses yeux devinrent humides. Ce n’était pas dans ses habitudes mais elle se rendait peu à peu compte de tout ce qui pesait sur elle au quotidien.
Son travail, son projet, la solitude, le mensonge quotidien qu’elle trimballait et maintenant une autre folle qu’elle sur ses épaules. Laissant tomber sa fourchette, elle plaqua ses mains contre ses yeux, ses deux coudes sur la table. Elle ravala calmement son moment de faiblesse, se redressant. Elle portait son masque habituel, froid et autoritaire. Allant dans la cuisine, elle revînt avec un verre à vin, une bouteille ainsi que sa boîte de cachets. Se servant un verre, elle soupira, versant quelques cachets dans l’alcool.
C’était le seul moyen de faire passer ce moment. De l’alcool, des médicaments et un plat réconfortant. Regardant Gil, un rictus apparu sur son visage, amer. « Elle t’as traitée de pute. Tu savais que t’étais ma pute? Parce que j’étais pas au courant. Je savais que je te logeais temporairement, mais pas qu’en échange, en plus de faire la bouffe, tu me fournissais de quelconques services. » Riant, elle bu une première gorgée, avalant un premier cachet.
« J’ai fais une énorme erreur Gil. Je vais être dans la merde. Et à cause de mauvaises circonstances, tu risques même peut-être d’être impliqué. Je suis désolée. » Ils avaient beau se disputer, se détester la plupart du temps, elle se sentait honteuse et les remords pesaient sur elle.
Il observait Adélaïde, détaillait ses mouvements. Il y avait quelque chose. Quoi, c’était une bonne question, il se demandait si c’était vraiment une bonne idée de demander, alors il s’abstint. Ce n’était pas le moment de partir dans une énième dispute. Il se contenta de hocher la tête et de poser son livre, gardant la page, pour venir à table, sans rien dire. Il n’avait pas grand’chose à raconter. Il n’avait rien fait de sa journée, à part relire le même vieux bouquin pour la sixième fois au moins depuis qu’il l’avait acheté, ce vieux truc en suédois qui faisait admirablement passer le temps quand il était trop long. Il lui avait déjà dit quelque chose en suédois. Livet tar det livet ger. La vie prend ce qu’elle donne. Il ne savait absolument pas si ç’avait un rapport avec ce qu’il s’était passé de l’autre côté de la porte, il avait dit ça comme ça, et n’avait pas pensé à traduire. De toute façon, Adélaïde n’avait pas rebondit sur ces quelques mots, alors il n’avait plus rien dit. Il la remercia d’un signe de tête et entama son assiette, conservant le silence presque religieux qui s’était installé entre eux deux.
Il gardait un œil sur Adélaïde. Il avait l’habitude d’entendre son téléphone sonner quand elle traversait quelques moments « crises ». Mais le plus souvent il arrivait en plein milieu, ou vers la fin, et il n’avait aucune idée de l’escalade que c’était. Il imaginait, mais ça n’allait pas plus loin. Mais il y avait bien quelque chose qui clochait, et il n’eut même pas de lui demander si ça allait qu’elle repartait vers la cuisine. Un bref petit soupir lui échappa quand il la vit revenir avec un verre de vin, la bouteille qui allait avec, mais surtout, la boîte de comprimés. Aucune idée de ce qu’étaient ces comprimés. Mais il y avait une bonne chose de sûre : ne jamais mélanger alcool et médicaments. Pourtant, il ne dit rien. Adélaïde était au courant des risques, les lui rappeler n’arrangerait pas les choses. Il n’avait pas envie d’une dispute, et même si dire à la jeune femme que le mélange était déconseillé si ce n’était proscrit était la chose à faire, il ne fit rien.
Il se contenta de l’écouter parler. Et il apprit par la même occasion qu’il était la pute d’Adélaïde. Il hocha légèrement la tête, son visage se fendit d’un rictus cynique qui ressemblait plus à une grimace empreinte de dégoût.
« Génial, je n’ai plus qu’à annoncer à mes parents que j’ai enfin trouvé de quoi arrondir mes fins de mois, il seront absolument ravis… »
Son père, surtout, mais c’était à part. Il se leva, vint prendre la jeune femme par le poignet et la guida jusqu’au canapé, la faisant s’y asseoir doucement avant de s’installer à côté d’elle. Il ne disait toujours rien quant au mélange alcool et médicaments, mais il venait de découvrir une facette encore inconnue d’Adélaïde. Dans sa tête trottait l’idée de s’en resservir plus tard, idée qui disparut vite parce que le temps n’était pas aux complots.
« Bon… Je ne connais pas toute l’histoire, à vrai dire je ne connais même rien de ce qui a pu se passer, c’est ta vie, je n’essaierai pas de venir m’y incruster. Tout ce que je peux te dire, c’est que j’en mourrai pas. »
Il inclina légèrement la tête de côté.
« On fait tous des erreurs, on a tous nos casseroles, et je peux te dire que j’en traîne un bon paquet. »
Au pire, les fous, il avait l’habitude de les gérer. Il soupira, hésita un peu. Et puis finit par passer ses bras autour des épaules d’Adélaïde, et resta comme ça quelques bonnes longues secondes. Avant de la lâcher, cherchant quelque chose à dire. De complètement hors sujet de préférence.
« T’as déjà goûté de l’aquavit ? »
Sûrement que non. Mais ça ne coûte rien de demander.
e regardant, elle hocha la tête, ne disant rien. Son verre en main, elle le posa sur la table basse en arrivant, s’asseyant calmement. Même dans les pires situations, on trouve toujours quelque chose qui arrive à nous surprendre. Comme le comportement de Gil à son égard. Sa dernière phrase la fit brusquement réagir. Une sorte de hoquet mélangeait à un éclat de rire qui fit perler à la naissance de ses cils quelques larmes qu’elle ravala aussitôt, un large sourire aux lèvres.
« Je connais pas non. »
Buvant une gorgée de vin, elle s’affaissa davantage dans le canapé, l’alcool et les médicaments arrivant peu à peu à se calmer. Terminant le reste en quelques gorgées, elle le reposa. Dans une demi-heure, elle serait assez assommée pour aller se coucher et oublier joyeusement ce qu’il venait de se passer. Ce n’était pas le meilleur moyen pour se soigner, Adélaïde le savait et se disait qu’un jour, elle mourrait sûrement d’une overdose.
L’alcool, la cigarette, les médicaments, tout ça. C’était une porte de sortie comme une autre. « Je suppose que ça se boit? » Finit-elle par ajouter à l’attention de Gil, curieuse de voir ce qu’il allait lui montrer.
Il sourit un peu. Normal, qu’elle ne connaisse pas. Pour connaître il faut monter jusqu’au Danemark, minimum. Ç’avait été idiot de poser la question, mais il fallait bien changer de sujet pour éviter que la soirée ne finisse par être aussi sombre que l’esprit d’un neurasthénique. Il reprit son livre, recommença à le feuilleter simplement. Il acquiesça d’un hochement de tête en réponse à la question d’Adélaïde. Oui. Ça se boit. C’est un alcool typiquement scandinave dans lequel on fait à peu près tout mariner, surtout le saumon.
« C’est l’eau-de-vie à la scandinave. Et comme on aime bien les trucs bizarres, tu l’auras remarqué, on l’aromatise souvent avec ce qu’on a : fenouil, thym, aneth, cannelle… »
Il tourna une page de son livre. Il avait une bouteille, chez lui. Envoyée par sa mère. Il se demandait comment la boîte avait pu passer la douane en transportant de l’alcool, mais il n’avait jamais pensé à demander à sa mère comment elle s’y était pris pour ça, puisqu’il ne répondait jamais aux lettres qu’elle lui adressait. Il finit par laisser son livre tranquille. Parce que de toute façon, il ne le lisait pas. Pas vraiment. Il connaissait déjà l’histoire, et les Henning Mankel sont toujours d’une lenteur parfois affolante. L’auteur prend le soin de poser l’ambiance et le contexte. Mais il y a cette lenteur proche de la réalité qui peut donner envie de lâcher l’histoire.
« Là tout de suite, j’en ai pas avec moi. Mais je pourrai en ramener quand j’aurai récupéré mon appartement. »
a description faite par Gil ne lui donnait pas réellement envie. Ça devait étrange, sûrement fort. Mais elle se disait que puisqu’il avait commencé à l’initier à sa culture, elle ne pouvait pas refuser. Ce serait une expérience en plus et elle pourrait dire que oui, elle avait goûté l’aquavit. Esquissant un sourire, elle finit par hocher la tête.
« En espérant que tu le récupères rapidement. » Et face à la tournure de sa phrase, sachant très bien qu’il pourrait mal l’interpréter, elle se corrigea. « Pas que j’ai envie de te virer hein. » Et voyant qu’elle s’enfonçait, elle continua. « Ni de te garder parce que… » Voyant bien que son petit cocktail commençait à faire effet, elle passa une main dans son visage, soupirant.
« Je suis fatiguée. Je vais aller me coucher. À demain. » Les contrariétés de la soirée s’étaient, comme prévu, envolées et la jeune femme faisant maintenant face à un état stable, calme, comateux. Se dirigeant vers son lit, elle s’enfonça dans les draps, s’endormant rapidement.
HRP : À moins que tu ai de quoi rebondir, on s'arrête là pour le moment?
# Top site 1
# Profil
# Profil
Accueil
